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Page:Corneille Théâtre Hémon tome1.djvu/259

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INTRODUCTION 8i

cette jalousie ridicule qu'on a voulu attribuer à un ministre contre le poète qu'il faisait travailler pour lui. I/amour- propre d'auteur de Richelieu était à coup sûr très susceptible, mais la vanité de grand seigneur devait y servir de contre- poids, et un poète premier ministre ne pouvait guère con- cevoir aucune idée de concurrence, ni par conséquent de jalousie, envers un poète qui n'était pas autre chose. * »

C'est mal poser la question, et les raisonnements théoriques n'ont rien à faire ici. En principe, il peut être vrai qu'un grand seigneur, un grand ministre ne doit pas s'abaisser à ces petitesses; en fait, il faudrait prouver que Richelieu i>«  s'y est jamais abaissé; or, tout prouve le contraire. Saws parler de la fameuse commission des Cinq Auteurs, dont l'histoire elle-même n'est pas fort bien élucidée, mais où Richelieu a joué cei'tainement le rôle d'un homme de lettres impérieux et irritable plus que celui d'un Mécène généreux et tolérant, tous les témoins contemporains nous montrent en lui « un très grand homme, qui avait au souverain degré le faible de ne point mépriser les petites choses ^ ». Il est vrai que le timide Pellisson se garde avec soin de préciser, et multiplie les sous-enlendus discrets : « Il ne faut pas demander si la gloire de cet auteur donna de la jalousie à ses concurrents. Plusieurs ont voulu croire que le cardinal lui-même n'en avait pas été exempt, et qu'encore qu'il estimât fort M. Corneille, et qu'il lui donnât pension, il vit avec déplaisir le re^Ue des travaux de cette nature, et surtout ceux où il avait quelque part, entièrement etfacés par celui- là. Pour moi, je n'examine point si cette âme. toute grande (ju'elle était, n'a point été capable de cette faililesse. Quoi qu'il en soit, il est bien certain (fu'en ce différend, qui par- tagea toute la cour, le cardinal sembla pencher du côté de M. de Scudéry ^. »

Sous les réticences nécessaires on devine assez clairement, ce nous semble, la pensée vraie de Pellisson. D'autres ne se croyaient pas obligés à la même réserve, et Tallemant des Réaux ne craignait pas d'écrire : « Il eut une jalousie enragée contre le Cid à cause que* les pièi;es des cinq auteurs n'a- vaient pas très bien réussi *. » Si mauvaise langue que soil Tallemant, il est bien informé des détails. C'est à lui que nous devons ce mot caractéristique : « A quoi pensez-?ous,

��i . Guiiot, Corneille et $on tmps.

J. Mémoires de Retz.

3 . Histoire de l Académie.

♦ . Historiettes, t. II, p. 5».

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