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INTRODUCTION 101

ajoute quelques réserves aux éloges, et qu'il semble renvoyer dos à dos Scudéry et Corneille, mais il laisse voir assez naï- vement à quel point lui pèse son rôle de critique officiel : « Maintenant, ces chaleurs de poètes nous embarrassent... L'atFaire est passée en procès ordinaire, et, moi qui vou» parle en ai été le rapporteur, et en dois parler encore à la première séance sur pièces nouvellement produites. Dieu veuille que nous en sortions plus à notre honneur que ceux qui nous ont rendus juges souverains et réguliers par leur défé-rence ! » A mesure que le terme du travail se rapproche, l'embarras du juge s'accroît : « Monsieur, toutes ces choses que vous supposez être en moi pour bien traiter la matière du Cid me manquent; et ce travail ne pouvait être donné à un plus pauvre homme que moi ni moins capable de satisfaire à l'attente du public : mais ni ce défaut, v ie temps que celte corvée m'a emporté et m'emportera ne sont pas les plus fâcheuses que j'y trouve. Je ne crains pas d'être blâmé de mal écrire, ni ne suis pas si chiche de mes heures que je ne les puisse employer sans autre utilité que de plaire à celui qui peut tout sur moi. Ce qui m'embarrasse, et avec beaucoup de fondement, est d'avoir à choquer et la cour et la ville, les grands et les petits, l'une et l'autre des parties contestantes, et en un mot tout le monde en me choquant moi-même sur un sujet qui ne devait point être traité par nous*. »

Contenter tout le monde, c'est à cette tâche impossible que Ckapelain se voue à contre -cœur; on ne lui reprochera pas, du moins, de n'avoir pas senti les difficultés de l'entre- prise. Que sera-ce, quand les impatiences de Richelieu l'au- ront rendue plus difficile encore, quand il faudra tour à tour ajouter des fleurs et en retrancher, quand il sera bien reconnu enfin « que cet homme ne voulait pas être contredit »? Cha- grin, découragé. Chapelain annoncera sans aucun enthou- siasme à ses amis la prochaine publication de son œuvre : « Dans quinze jours, Camusal vous enverra le procès du Cid, qu enfin nous avons été contraints de donner au public..., ces benoîts Sentiments de l'Académie qui m'ont tant de fois mis en colère, et tant de fois fait désirer d'être aussi loin de Paris que vous... Cette publication était une des plus difficiles choses à nous faire exécuter qu'aucune qu'il (Richelieu) ail encore entreprise. Mais est factum quodcumque cupit ^. » C'esl lans enthousiasme aussi , mais avec une satisfaction modeste

1. Lettn à Balzac, 22 août 1637.

t. Lettres à Godeau, 12 novembra; à Bakaa, 30 décembre; à M. d* Saial- Chartres 34 décembre 1637.

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