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ETUDE D ENSEMBLE xii

Mais le même Fonlenelle ajoute : « Il avait le visage assez agréable, un grand nez, la bouche belle, les yeux pleins de feu, la physionomie vive, des traits fort marqués et propres à être transmis à la postérité dans une médaille ou dans un buste*. » Voilà bien, en effet, le Corneille q^ue la postérité connaît, dont la peinture et la sculpture ont popularisé l'image, fort peu sem- blable à celle d'un marchand, le Corneille dont les précieuses avaient le droit, ce nous semble, d'admirer la beauté virile, à qui toujours, enfin, elles demeurèrent fidèles, même lorsque Racine devint le favori de la jeune cour.

Ne serait-ce pas l'influence de l'hôtel de Rambouillet, plus réelle ici qu'on ne l'a cru, qui, au lendemain de Polyeucle, déci- dait Corneille à revenir au goût espagnol?» J'ai cru, dit-il, que nonobstant la guerre des deux Couronnes, il m'était permis de tra- fiquer en Espagne. Si cette sorte de commerce était un crime, il y a longtemps que je serais coupable, je ne dis pas seulement pour e Cid, où je me suis aidé de don Guilhem de Castro, mais aussi pour Médée, et pour Pompée même, où, pensant me fortifier du secours de deux Latins, j'ai pris celui de deux Espattnols, Sénèque et Lucaiu étant tous deux de Cordoue... J'ai fait Pompée pour satisfaire à ceux qui ne trouvaient pas les vers de Polyeucte si puissants que ceux de Cinna, et leur montrer que j'en saurais bien retrouver la pompe, quand le sujet le pourrait souffrir 2. » Ou cette déclaration n'a pas de sens, ou elle indique, avec assez de netteté, que, cette fois encore, Corneille a écouté ou feint d'é- couter des avis qui. d'ailleurs, étaient d'accord avec ses inclina- tions secrètes. C'est sans doute de l'hiver de 1643-1644 que datent Pompée et le Menteur. Si différentes de forme que semblent au premier abord ces deux œuvres, elles ne sont point différentes d'esprit : Pompée met en scène les Romains de Balzac, adoptés par Corneille, mais les attendrit pnr le voisinage de Cléopâtre; le Menteur, aux conversations de galanterie quintessenciée môle l'éloquente indignation de Géronte; de part et d'autre, même raf- finement et même grande éloquence.

11 parait probable que la Suite du Menteur (1644) fut lue chez le chancelier Séguier, et Rodogune (1644), chez Condé, ou devant

Condé, à l'hôtel de Rambouillet, car ou ne peut expliquer qu'ainsi

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1. Vie de Corneille. t. Éijilre du Menteur.

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