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Page:Corneille Théâtre Hémon tome1.djvu/429

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ACTE IV, SCÈNE II 255

CHIMÈNE.

Ah ! ce n'est pas à moi d'avoir tant de bonté ;

Le devoir qui m'aigrit n'a rien dp limité.

Quoique pour ce vainqueur mon amour s'intéresse,

Quoiqu'un peuple Fadore, et qu'un roi le caresse,

Qu'il soit environné des plus vaillants guerriers, H95

J'irai sous mes cyprès accabler ses lauriers,

l'infante.

C'est générosité, quand pour venger un père

Notre devoir attaque une tête si chère;

Mais c'en est une encor d'un plus illustre rang,

Quand on donne au public les intérêts du sang. 1200

��difficile désormais de poursuivre le vainqueur des Maures, elle accroît d'avance le mérite de l'héroïne, opiniâtre jusqu'au bout dans l'accomplissement de son devoir.

1191. \ar. Ah! Madame, souffrez qn'avecqne liberté Je ponsse jusqu'au bout ma générosité. Qaoiqae mon cœur ponr lui contre moi s'intéresse... (163T-66.)

Var. Ah I ce n'est pas à moi d'avoir cette bonté. (1660.)

1193. Voyez la note du vers 429 sur la locution s'intéresser pour, employé* non seulement par Corneille, mais par Racine et ses contemporains, dans le sens de prendre parti pour :

Mon casar, mon l&ch* ccBor l'intérttte pour lui. [Andromaque, Y, 1.)

H'^7. La générosité, nous l'avons vu par plusieurs exemples, c'est la magna» nimité d'une âme bien née.

1198. Une tète si chère; cet hémistiche reparaîtra au vers 1726; on le r^ trouve aussi dans Rodogune (v. 784) et dans Théodore (v. 231). Racine a dit :

J'ignore le destin d'une tête ti chère. (Phèdre, I, 1.)

M. Géruzez rappelle les vers d'Horace dont les deux poètes ont pu s'inspirer :

Quis desiderio sit pudor aut moduÊ Tarn cari capitis ? [Od., I, 24.)

On trouve dans Sophocle, plusieurs fois répété, xamifvr^tov «&;■, aitiliXf** «Bfa, flXTOTOv xàça.

1199. Rang est ici pris au figuré dans le sens d'importance.

U cesse de devoir quand la dette est d'un rang

A ne point s'acquitter qu'aux dépens de leur sang. [Pompée, 1S9.)

MM. Littré et Godefroy citent Montaigne : « L'authorité de ces tesmoins n'a pas à l'adventure assez de rang pour nous tenir en bride. »

1200. Donner à, accorder, sacrifier à, comme le latin condonare,

Je donne à la nature ainei qu'à la raison. [Pompée, 1792.)

Noos donnons quelque chose à Rome qui se plaint. [Nicoméde, 1303.)

« Qu'ils donnent leurs passions, leurs querelles, leurs vengeances et leur; «mbitions au bien de la France. » (Lettres missives de Henri iV, 4 mare 1592.) « Hâtons-nous de donner à Dieu nos ressentiments. » (Bossuet, Sermon pour le mardi de la troisième semaine de Carême.) « Si j'avais plus de santé, et •• j'aimai* asseï la gloire pour lui donner ma paresse, je la voudrais plus générale

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