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362 LE CID

Enfin avec le flux nous fait voir trente voiles;

L'onde s'entle dessous, et d un commun effort 1275

Les Mores et la mer montent jusques au port.

On les laisse passer; tout leur paraît tranquille:

Point de soldats au port, point aux murs de la ville.

Notre profond silence abusant leurs esprits,

Ils n'osent plus douter de nous avoir surpris. 1280

Ils abordent sans peur, ils ancrent, ils descendent,

Et courent se livrer aux mains qui les attendent.

Nous nous levons alors, et tous en même temps

Poussons jusques au ciel mille cris éclatants.

Les nôtres à ces cris de nos vaisseaux répondent; 1283

Ils paraissent armés, les Mores se confondent,

L'épouvante les prend à demi descendus ;

Avant que de combattre, ils s'estiment perdus.

en usaient davaDtage, et parfois en abusaient. Rotrou, par exemple, sans attein- dre jamaii à cette forte précision, multiplie les descriptions de lanoit:

Le ciel laisse à nos yeux paraître les étoiles :

Le soleil est dans ro'ode et la nuit tead ses voiles. (Célimène, V, ♦.)

Jamais cet horizon ne se rit plus en paix; Jamais le ciel ne prit an bandeau pins épais : Je n'entends ancan brait, la Inné est enilormie.

{Occasions perdutê, III, S.)

Dieu ! qoe le ciel ce soir coavre d'an voile obscar

Le lambris étoile de sa voûte d'azor ! (Devx pueeUet, L 1.)

B74. Var. Enfin avec le flnx nous fit voir trente voiles. L'onde s'enflait dessoas. et d'an commun effort Les Mores et la mer entrèrent dans le port (1637-60).

1280. Us n'osent plus douter, alliance de mots remarquable, car douter im- plique d'ordinaire une crainte ou tout au moins une hésitation, une incertitude.

1281. « Corneille nous apprend qu'i7s ancrent, tout comme l'eût fait un marinier de Rouen, racontant un événement du même genre. » (M. Marty-La- veaux.) Il est vrai que le poète c'est là un des traits distinctifs de sa langue) aime à employer le mot propre; mais ancrer est un fort vieux mot, très fran- çais, qu'on trouve souvent même chez les prosateurs, de Joinville à d'Aubigné.

1283. Cl On peut dire de ce mouvement, de ce beau récit impétueux, ce que Ciceron disait de pareils récits de Thucydide : Canit bellicum. C'est le chant du clairon. » (Sainte-Beuve, Nouveaux lundis, VU.)

1^85. Var. Les nAtres an signal de nos vaisseaux répondent. (1637-M.)

<■ Ce vers est si mal rangé qu'on ne sait si c'est le signal des vaisseaux, ou si des vaisspitu on répond au signal. » (Ai-adémie.) C'est pour faire disparaître ?etteainpliibolMgie que Corneille s'est corrigé.

\îi6. Se confondent, se mêlent en désordre. « Turenne meurt, tout se con- fond. •> (Flechier. Oraison funèbre de Turenne.) Se confondre se dit donc, au propre, du désordre matériel que la brusque apparition des Espagnols embus lues jette parmi les Maures, et peut-être aussi, au figuré, du trouble moral qui es égare.

1:288. Avant que de combattre pour avant de combattre. Au vers 1334, Cor ueille écrira, au conlrnire. ai<ant que sortir, et c'tst cette tournure, plus com mode, qu'il emploie de préférence. Voyez notre édition de Polyevete (815 et

��e, qu I ), du ,

��1373), du Menteur (422, 585), de Cinna (829J.

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