Page:Corneille Théâtre Hémon tome1.djvu/88

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Lxxiv ETUDE

rapport, que VExamen de la Galerie du Palais : « Célidée et Hip- polyte sont deux voisines, dont les demeures ne sont séparées que par le travers d'une rue. Il est vrai que ce qu'elles y disent serait mieux dit dans une chambre ou dans une salle, mais c'est un accommodement de théâtre qu'il faut souffrir pour trouver cette ri^;oureuse unité de lieu qu'exigent les grands réguliers «. » Si les « grands réguliers » ne se montrèrent pas satisfaits de ce compromis, c'est, en vérité, qu'ils étaient difficiles à satisfaire : il en coûte si peu au spectateur ou au lecteur pour supposer que tout se dit et se passe dans un lieu abstrait, sur un terrain idéal, rue, chambre, campagne, qu'importe! Nullement agressif par nature, Corneille s'assujettissait volontiers à l'avis des autres, pourvu qu'on ne lui demandât qu'un acquiescement de pure forme et qu'on lui permit, cette formalité accomplie, de garder intacte sou opinion propre. Chaque fois qu'il a parlé des règles qiie les pédants contemporains prétendaient avoir découverl-'s chez Aristote, il l'a fait avec un singulier mélange de respt-ct et de liberté : « Il faut, écrira-t-il, sll se peut, nous accommoder avec elles et les amener jusqu'à ndus 2. » Les anciens commen- tateurs savaient l'art de solliciter les textes; Corneille a inventé l'art de solliciter les règles. En vérité, toute cette diplomatie poé- tique ne nous rappelle-t-elle pas, malgré nous, ce mot d'une co- médie moderne : « La loi! je la respecte, puisque je la tourne! »

Écartons ces subtilités, ces ruses parfois assez puériles, étalions , droit à la page, à la fois piquante et profonde, qui nous donnera la pensée de Corneille tout entière :

" J'aime à suivre les règles; mais, loiu de me rendre leur es- clave, je les élargis et resserre selon le besoin qu'en a mon sujet, et je romps même sans scrupule celle qui regarde la durée de . l'action, quand sa sévérité me semble absolument incompatible avec la beauté des événements que je décris. Savoir les règles et entendre le secret de les apprivoiser adroitement avec notre théâtre, ce sont deux sciences l>ien différentes; et peut-être que pour faire maintenant réussir une pièce, ce n'est pas assez d'avoir étudié dans.;, les liwres d'Aristote et d'Horace. J'espère un jour traiter ces matières plus à fond et montrer de quelle espèce est J^^ .A5rai?e^ïiJ)laace qu'ont; suiTie ces grands maîtres des aatrQa

1. Eseinicn de la Galerie du Palais. ■ ' -'•

2. Diacours du poème dramatique. t'U'i;'-';. ■•., i.; ■.-^v ■ . ' : i >i'

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