INTRODUCTION 29
les sévérités d'Auguste! En vérité, si, da.ns Polt/eucte, on a peine à se figurer Félix, cette àme médiocre, illuminé tout à coup par la grâce, combien plus indigne encore paraît Maxime ao cette clémence qui descend jusqu'à lui si bas! Il est un peu tard pour le relever à nos yeux et aux siens.
«Le ridicule, a dit La Rochefoucauld', déshonore plus que le déshonneur. » Ce mot d'un contemporain de Corneille éclaire le caractère de Maxime, au moins aussi ridicule qu'odieux. Sans se faire le docile écho des critiques surannées de La Harpe, sans répéter, par exemple, après lui, que « ce rôle est indigne de la tragédie » (car pourquoi la tragédie s'intei'di- rait-elle la peinture de la laideur morale, même risible ?), on a le droit de juger avec lui que le stratagème imaginé par Maxime et Euphorbe est bien froid et mal inventé. Toute une révolution en sortira pourtant bientôt; si leffet est dra- matique, la cause ne l'est guère. La déclaration de Maxime à Emilie, au quatrième acte, est plus invraisemblable encore et plus déplacée. On l'a dit niaintes fois avec raison : il n'a pu sérieusement espérer qu'elle donnât dans un piège aussi grossier. La seule réponse qu'il obtienne est une raillerie, d'autant plus cruelle qu'elle porte juste :
Maxime, en voilà trop pour un homme avisé*.
La confusion du trompeur trompé n'a d'égale que sa naïveté; mais nous nesommespoint tentés de l'en plaindre, etl'amour, cette passion facilement tragique, qui nous touche même chez un personnage de comédie, quand ce personnage s'appelle Alceste, nous prête à rire ici, à la veille d'une crise qui tient nos esprits en suspens. 11 grandit Cinna et rapetisse Maxime. « L'amour rend tout permis, » on nous en a prévenus. D'où vient pourtant qu'il excuse le complot de Cinna contre son bienfaiteur, et n'excuse point la trahison de Maxime, ou plu- tôt qu'il l'aggrave? N'alléguons point l'infériorité radicale du caractère : il est faible, il G>t vrai, — comme celui de Cinna, — mais non pas endurci de." i une longue habitude du crime: on le reconnaît bien à sa façon maladroite d'être criminel. Son amour seul le pousse aux pensées basses; dès qu'il cessera d'aimer, il reviendra sans doute à son honnêteté et à sa di- gnité primitives. Ne cherchons pas ailleurs la raison d'être de ce rôle visiblement sacrifié. Amoureux et aimé, Cinna prend place naturellement dans le groupe des amants héroïques. Malheureux en amonr, Maxime doit se résigner à la situation subalterne et fausse des don Sanche, des Valère, des Attale,
i. Maximes, CCCXXVI. S. Acte IV, se. y.
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