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ACTE II, SCÈNE II 115

Teint du sang de celui qu'elle aime comme un père? Car vous n"êtes pas homme à la violenter.

CINNA.

Ami, dans ce palais on peut nous écouter,

Et nous parlons peut-être avec trop d'imprudence 705

Dans un lieu si mal propre à notre confidence.

Sortons, qu'en sûreté j'examine avec vous,

Pour en venir à bout, les moyens les plus doux.

704. C'est s'en apercevoir peut-être un peu tard ; Voltaire n'a pas de peine i montrer combien il est invraisemblable que l'on ronspire dans le cabinet même d'Auguste. Avant lui, l'abbé d'Aubignac avait écrit : « Je n'ai jamais bien pu concevoir comment M. Corneille peut faire qu'en un même lieu Cinna conte à Emilie tout l'ordre et les circonstances d'une grande conspiration contre Auguste, et qu'Auguste y tienne un conseil de confidence avec ses deux favoris. » (Pra- tique du théâtre, IV, 3.) Voyez comment, dans .wn Siamen. Corneille répond à cette critique. Pour nous, dont l'unité de lieu est le moindre souci, nous ne voyons aucune difficulté à siinpo.-er que le premier acte se passe dans la ch;imbre d'Emi- lie, même hors du palais de l'empereur, et le second dans le cabinet d'Auguste, ou plutôt que l'action se déroule dans ce lieu idéal et neutre, cher à la tragédie classique, où tous les personnages se rencontrent comme par hasard.

706. On employait alors, sans scrupule, mal propre dans la haute comédie et la tragédie, au lieu de peu propre, peu apte ou peu convenable à :

Monsieur, je snis mal propre à décider la chose. (Misanthrope, I, u.) Vous me trouvez mal propre à cette contidenoe. (Rodogwie, 295.)

708, « Ici l'intérêt change : on détestait Auguste, on s'intéressnit beaucoup à Cinna ; maintenant c'est Cinna qu'on hait, c'est en faveur d'Auguste que le cœur se déclare. <> (Voltaire.) Le revirement nous paraît plus lent et moins complet que Voltaire ne l'affirme. Il est certain qu'au premier acte nous sommes a>ec Cinna contre Auguste; au second, la grandeur d'àrae in.ittendue d'Auguste nous étonne, la duplicité de Cinna nous trouble; nous demeurons donc inrertains et comme en suspens, devinant déjà qu'on nous a trompés en nous peignant un Auguste si dilférentde l'Auguste véritable, mais curieux de savoir jusqu'à quel point nous avons été trompes, peut-être même gardant la vague espérance que, ai Auguste se maintient à la même hauteur, Cinna. du moins, saura se relevjr par quelque acte de courageuse franchise.

��FIN DE l'acte OEUXIÈMI.

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