Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/31

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iNTtlOnUCTION (5

« LKS DUUMVIRS.

« La douleur vous trouble, et vous perdez la raison.

« PUDLIUS H0RATIU8.

« Vous l'avez perdue vous-même, si vous croyez que la loi existe encore. iNi roi, ni décret, ai sénat, ni liberté, il n'a plus rien existé dans Rome, du moment où mon fils s'est présenté au combat; dès lors, tout a dépendu de son épée, de sa va- leur. S'il s'était montré moins grand aujourd'hui, sénat, liberté, roi, décret, Albe avait tout en sa puissance. Il faut donc au moins que, pendant ce jour, devenu glorieux, mémo- rable et sacré parla vertu de ce jeune héros, ce soit lui seul qui soil maître de punir et de pardonner. Demain, la patrie, la cité reprendra son empire, et la loi tout son pouvoir. »

En somme, et malgré tous ces mérites, qu'y a-t-il de vrai- ment original dans VOrazia? Rien, peut-être, si ce n'est le coup de tonnerre de la fin. On avouera que c'est insuf- fi.-ant.

En réalité, Corneille n'eut, du moins sur la scène française, qu'un devancier: c'est un certain Pierre de Laudun d'Aigalicrs, auteur d'un Art poétique et de deux tragédies: la première, Di'itiétinn, raconte le martyre de saint Sébastien; la seconde, Horace trigéniine^{\es trois Horaces), dédiée au duc de Joyeuse, s'inspire de Tite-Live et de bien d'autres encore; car l'auteur trouve moyen de citer pêle-mêle « Plinms Novoco- mensis, Titus Livius, Virgiiius, Ptolomœus, Chronica chroni- corum, Johannes Functius, Ovidius, Plutarchus, Alexarchus ». Elle se compose de trois parties, gauchement reliées entre elles: \° le combat des Horaces et des Curiaces, épisode hé- roïque traité en style pittoresque ; qu'on en juge par ce vers souvent cité:

Çà, çà, tue, tue, tue! — Çà, çà, çà, tue, tue, pif, paf;

2° Le procès du « sorricide » et son acquittement : — 3° La m o rt deTullusHostilius, qui,coupabled'avoir fait écarteler le chef dos Albains, Metius Sulfelius, est foudroyé « avec son gentil- homme ». On a critiqué la duphcité d'action de la tragédie cornélienne; mais que dire de l'action triple et du double dé- nouement de l'Horace trigémine?

Ce serait faire injure à Corneille que d'insister sur cette comparaison; mais le troisième de ses devanciers est plus digne d'être nommé à côté de lui. C'est à soixante ans (1662)

1. Les poésies de Pierre de Latrdun d'Aigaliers, contenant deux tragédies, J» Diane, mélanges et acrostiches. Œuvre autant docte et pleine de moralité (ju# Iw matières y traitées sont doctes et récréatives.

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