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ACTE IV, SCENE II I4i

Les secrets de mon âme et le soin de ma vie?

Reprenez le pouvoir que vous m'avez commis,

Si, donnant des sujets, il ôte les amis;

Si tel est le destin des grandeurs souveraines 1123

Que leurs plus grands bienfaits n'attirent que des haines,

Et si votre rigueur les condamne à chérir

Ceux que vous animez à les faire périr.

Pour elles rien n'est sûr; qui peut tout doit tout craindre.

Rentre en toi-même. Octave, et cesse de te plaindre. 1130 Quoi! tu veux qu'on t'épargne, et n'as rien épargné! Songe aux fleuves de sang ofi ton bras s'est baigné, De combien ont rougi les champs de Macédoine, Combien en a versé la défaite d'Antoine, Combien celle de Sexte, et revois, tout d'un temps, 113o

empruntés à Sénèqiie : « Gemcns subinde voces emittobut varias et inter se con- trarias, etc. » — « Voilà encore une occasion où un monologue est bien plaf-é ; la situation d'Auguste est une excuse légitime. D'ailleurs, il est bien écrit, les Ters en sont beaux, les réflexions sont justus, intéressantes ; ce morceau est digna dn grand Corneille. » (Voltaire.) — Fie?-, pour confier :

Clier prince, dont je n'ose, en mes plas doux souhaits.

Fier encor le nom aux murs de ce palais. {Rodoqune, 886J

Ton cœar ne peut fier ce discours à ta bouche. (Rotron; Filandre,ïl. 2.)

1123. Commettre, conOer, dans le sens de committere ; c'est donc un latinisme comme fier:

Ta m'as commis ton gorl; je t'en rendrai bon compte. {Horace, BB9.)

1128. Animera, plus vif, mais aussi moins usité que pousser à, excitera, M. Littré cite, de cette expression, plusieurs exemples, antérieurs au ivn* siècle. < Cela l'anime à poursuyvre sa poincte. » (Montaigne.) — « Animons et préparoos: nos gens à vaincre. » (La Noue.)

1129. « Multos timere débet quem mulli timent. » (Publius Syrus.) Trois ans avant Cinna, Agamemnon disait, dans VIphigénie, de Rolrou;

Tel est l'ordre fatal des affaires humaines,

Qae les pl.is çrands honneurs soient les plus grandes peines ;

Qui plus a de sujets a le plus de souci. (I, 6.)

1130. Ce qui fait l'intérêt de ce monologue, ce n'est pas seulement le combat tumultueux que les sentiments les plus opposés se livrent dans une âme encore mal affermie ; c'est que le héros se dédouble, pour ainsi dire, et que, derrière Auguste, reparaît Octave. L'empereur penche vers la clémence, le triumvir vers la vengeance cruelle. Qui l'emportera? A de certains moments, l'on peut craindre que ce ne soit le triumvir.

1133. Allusion à la bataille de Philippes De combien, pour de combien de sang. L'ellipse du mot sang, exprimé dans le vers précédent, est hardie; mais, avec M. Geruzez, nous la trouvons naturelle et énergique. — Rougir est ici pria neutralement pour devenir rouge de

1134. Nous dirions plutôt : en a fait verser ; car il est malaisé de personnifier nne défaite. Il s'agit de la bataille d'Actium, comme, dans le vers suivant, de la tictoire remportée sur Sextus Pompée par Agrippa, entre Nauloque et Myles (as 723 de Rome).

1135. Tout (fuit temps signifie, au zvii* siècle, soit immédiatement, soit M %ime temps :

Tout d'un temps on le voit y voler. [Horace; Vf, 2.)

Il lui sera facile D'apaiser tout d'un temps les mânes de Camille. (Vi S.)

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