Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/434

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

70 POLYEUCTE

Qui regarde en arrière, et, douteux en son clioix. Lorsque sa voix l'appelle, écoute une autre voix.

POLYEUCTE.

Pour se donner à lui faut-il n'aimer personne ?

NÉARQUE.

Nous pouvons tout aimer, il le souffre, il l'ordonne ; 70

Mais, à vous dire tout, ce seigneur des seigneurs

Veut le premier amour et les premiers honneurs.

Comme rien n'est égal à sa graudeur suprême,

11 faut ne rien aimer qu'après lui, qu'en lui-même.

Négliger, pour lui plaire, et femme, et biens, et rang, 75

Exposer pour sa gloire et verser tout son sang.

Mais que vous êtes loin de celte ardeur parfaite

Qui vous est nécessaire, et que je vous souhaite !

Je ne puis vous parler que les larmes aux yeux.

Polyeucte, aujourd'hui qu'on nous hait en tous lieux, 80

Qu'on croit servir l'Étal quand on nous persécute,

Qu'aux plus âpres tourments un chrétien est en butte,

Seigneur, votre retour, loin de rompre ses coups,

Vous expose vous-même et m'expose après vous. {Nieomède, 77.)

On est étonné, dit M. Godefroy (Lexique de Corneille) que Voltaire soit en doute sur l'expression romjire un coup : elle est prise du jeu de paume. Du reste, la manière dont Coniflille la place la rend suffisaumient noble. « Le pape suscitait sous main les Ani;l:iis, l(!s Suisses et les Médicis pour rompre ce coup.* (Mêzeray, Abrégé de l'histoire de France.)

67. Douteux, non pas dont on doute, mais qui doute, irrésolu, hésitant.

La belle occasion que votre jalousie,

Doulciise eocor qu'elle est, a proinplement saisie! {Don Sanchc, 1098.)

74. C'est ainsi que saint Augustin, dans les Confessions, permet les affections humaines, à condition qu'elles se confondent avec l'amour de Dieu : « Si placent animae, in Deo amentur;quia et ips;e mulabiles sunt, et in illu fixœ stabiliuntur , alioquin irent et périrent. In illo ergo amentur, et râpe ad eum tecum quos potes, et die eis : Hune amemus, hune amemus! » Saint Mathieu va plus loin encore, et dit presque dans les mêmes termes que Néarque : « Qui reliquoril domum, vel fratres aut sorores aut patrem aut matrcm aut uxorem aut filios aul agros propter uoraeu meuni, centuplum accipiet, et vitam aeternara possidebit. > (XIV, 29.)

75. La foi de Néarque est bien exclusive, et non moins exclusive sera bientôt a foi de Polyeucte. Par malheur, c'est aussi cel\e qu'enseigne Tartuiïe à Orgon,

r>e toutes amitiés il ilélaelie mon âme.

Et je verrais mourir fière. enfant, mère et femjie.

Que je m'en soucierais autant que de cela. (Tarlu/fe, I, 6.)

Î7. Var. Mais que vous êtes loin de cette amour parfaite. (1643-68.) On ne trouve ardeur que dans l'édition de 168:2. Mais M. Marty-Laveaux a raison de remarquer que ce changement était nécessaire, bien qu'amour sdit féminin aux vers 313, 689, 1163, 1243 : en effet, il s'agit ici de l'amour divin ^i avait déji été indiqué par Vaugelas comme étant toujours masculin 82. Apre, rude, rigoureux.

Et je garde, au milieu de tant d'âpres rigueurs.

Met Uriues aux vainciu, et ua haine aiu vaiii«a«ars. [Boi-alx, •&!

�� �