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Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/506

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us POLYEUCTE

Daignez considérer le sang dont vous sortez,

Vos grandes actions, vos rares qualités:

Chéri de tout le peuple, estimé chez le prince, il 75

Gendre du gouverneur de toute la province;

Je ne vous compte à rien le nom de mon époux:

C'est un bonheur pour moi qui n'est pas grand pour vous;

Mais après vos exploits, après votre naissance,

Après votre pouvoir, voyez notre espérance ; 1180

Et n'abandonnez pas à la main d'un bourreau

Ce qu'à nos justes vœux promet un sort si beau.

POLYEUCTE.

Te considère plus; je sais mes avantages,

Et l'espoir que sur eux forment les grands courages.

Ils n'aspirent enfin qu'à des biens passagers, 1185

Que troublent les soucis, que suivent les dangers;

La mort nous les ravit, la fortune s'en joue ;

Aujourd'hui dans le trône» et demain dans la boue;

1173. Le sang dont vous sortes, la race dont vous tirez votre origine : Étant sorti de vous, la chose est peu douteuse. {Menteur. V, 3.)

1176. Est-il vrai, romme le prétomi Voltaire, que foute gâte le vers, parce qu'il est à la fois inutile et emphatique? Ne semble-t-il pas naturel, au contraire, que Pauline enfle ici un peu la voix pour exagérer la situation de Polyeucte et lui faire sentir la grandeur des avantages qu'il sacrifie?

1177. Je ne vous compte à rien, je ne compte pour rien :

Depuis quand le retour d'un cœur comme le mien

Fail-il SI peu d'honneur qu'on ne le compte à rien ? {Suréna, B96.)

1180. « Voltaire, qui n'avait point critiqué ce vers dans la première édition de son Commentaire (17G4), dit dans celle de 1774 : « On ne peut dire après votre naissance, après votre pouvoir, comme on dit après vos exploits. Voyez notre espérance est le contraire de ce que Pauline entend; car elle entend : voyez 1» juste terreur qui nous reste, voyez ou vous nous réduisez, vous d'une si grande naissance, vous qui avez tant de pouvoir. » L'emploi du mot après nous parai! très naturel dans tout ce passage; c'est comme s'il y avait : après avoir considéré vos exploits, votre naissance, votre pouvoir, considérez encore tout ce qu'il nous reste à espérer. Les deux derniers vers (1181-82) ne laissent aucun doute à ce sujet. » (M. Martv-Laviaux.) M. Godefroy croit, au contraire, qu'espérance a ici le sens de ce que 7ious devons attendre, les malheurs qui nous sont réservés. C'est là, selon lui, un latinisme, et il cite, pour le justifier, \ Enéide et la Chanson Roland :

Hune ego si tantum potui sperare dûlorem. (IV, 419.) Ki de mûrir nen orent espérance.

Mais nous préférons l'explication de M; Marty-Laveaax. Espérance n'est point du tout un euphémisme, comme on l'a dit; il faut l'i^ntendre au propre des pro- messes de l'avenir, ce que le v. 1182 démontre surabondamment.

1184. Sur courage, voyez les v. 170, 332, etc. Dans ces deux vers, observe M. Merlet, Polyeucte a le ton d'un gentilhomme. Cette nuance se retrouvera plu» tard. Dans les vers suivants, il prendra le ton d'uH philosophe stoïcien.

1188. Dans le trône, sur le trône.

Un prince est dans son trône à jamais affermi. {Nicoméde, 891.) le («rais datu le tr6ne où 1» ciel ui'a fait naître {Uéraclius, IM.)

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