Page:Corneille Théâtre Hémon tome2.djvu/530

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m POLYEUCTË

PAULINE.

Tigre, assassine-moi du moins sans m'outrager. 1583

POLYEUCTE.

Mon amour, par pitié, cherclie à vous soulager:

il voit quelle douleur dans l'âme vous possède,

Et sait qu'un autre amour en est le seul remède.

Puisqu'un si grand mérite a pu vous enflammer,

Sa présence toujours a droit de vous charmer : 1590

Vous l'aimiez, il vous aime, et sa gloire augmentée...

PAULINE.

Que t'ai-je fait, cruel, pour être ainsi traitée.

Et pour me reprocher, au mépris de ma foi,

Un amour si puissant que j'ai vaincu pour toi ?

Vois, pour te faire vaincre un si fort adversaire, 1593

Quels efforts à moi-même il a fallu me faire;

Quels combats j'ai donnés pour te donner un cœur

Si justement acquis à son premier vainqueur;

Et si l'ingratitude en ton cœur ne domine.

Fais quelque effort sur toi pour te rendre à Pauline : 1600

Apprends d'elle à forcer ton propre sentiment;

Prends sa vertu pour guide en ton aveuglement;

Souffre que de loi-même elle obtienne ta vie,

Pour vivre sous tes lois à jamais asservie.

Si tu peux rejeter de si justes désirs, 1605

Regarde au moins ses pleurs, écoute ses soupirs;

Ne désespère pas une âme qui t'adore.

POLYEUCTE.

Je VOUS l'ai déjà dit, et vous le dis encore,

1585. Tigre, cruel; voyez le v. il25. Ici, il faut bien le reconnaître, Paulin» efface un peu Polyeufte, qui nous semble bien froiii, mais exagère peut-être à dessein cette froideur, pour raieui se défendre d'un danger qu'il sait trop réel.

1B86. Var. Ma pitié, tant s'en faut, cherclie à vons soulager; Notre amoar tous emporte à des doolears si vraies Que rien qa'un autre amour ne peat goérir ces plaies. (16*3-1656.)

1590. C'est la répétition presque textuelle des paroles de Pauline; voyez lei T. 615-616. A droit de, a lieu de.

Sa dontear secrète a droit de l'éloigner. {Rodogune. IG02.)

Le Capilole a droit d'en craindre un coup de maître. (A'i'comWe, Ï20.)

1596. A moi-même, sur moi-même; voyez le v. 1354.

1597. Donnés pour te donner, légère négligence. L'Académie admet l'expres- Bion : donner un combat. Corneille dit aussi « donner bataille», «il lui donna bataille » (Rodogune, 69), et, très souvent, « rendre un combat ».

1601. « Le mot propre est dompter. » (Voltaibe.) Forcer était alors sjmonynM de dompter:

Forcez en ma fa^%ar une trop juste haine. (Pompée, 1223.) Il y en a d'innombrables exemples chez Rotrou. 1607. « Comment Pauline peut-elle dire qu'elle adore Polyeucte? Elle lui

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