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14 POMPÉE

Acte III. — Comme Hector apparaît a Énée chez Virgile, Pompée apparaît à Cornélie, qui nous raconte complaisam- ment ce songe, en y mêlant de visibles réminiscences de VEnéide ; mais on cherche vainement ici l'utilité dramatique de la vision imag-inée par Garnier ; peut-être ce récit est-il un simple prétexte au chœur qui suit et qui combat la croyance aux songes par des arguments, d'ailleurs, irréfu- tables. On ne voit pas bien non plus pourquoi Cicéron, après avoir employé tant de vers, au premier acte, à accuser l'am- bition dominatrice des Romains, en consacre tant, au troi- sième, à déplorer leur asservissement ; mais l'intérêt se relève, et l'émotion s'accroît, ou plutôt naît pour la première fois, lorsque l'atfranchi Philippus apparaît, portant les cen- dres de Pompée, lorsque Cornélie s'écrie en les recevant:

douce et chère cendre, ô cendre déplorable,

Qu'avecque vous ne suis-je? femme misérable,

pauvre Cornélie, hé ! u'aura jamais fin

Le cours de cette vie où me tient le destin ?

Ne serai-je jamais avecque vous, ô cendre ?

N'est-il temps qu'on me fasse au sépulcre descendre?

A. la plainte succède l'invective, l'amère ironie :

PHIUPPUS.

César pleura sa mort.

CORNÉLIE.

Il pleura mort celui Qu'il n'eût voulu souffrir être vif comme lui.....

��PHILIPPUS.

��Si fit-il égorger Achillas et Photin Pour ce meurtre commis.

COR?iÉLIE.

Ce fut pour autre fin. Us avaient conspiré de le meurtrir lui-même.

Là est la diflFérence capitale des deux tragédies, au point de vue du caractère de César. Corneille a pris à Garnier un trait amer, mais il n'a pris que ce trait; la douleur tardive que César manifeste a pu sembler suspecte à sa Cornélie, et elle a pu le dire ; pourtant, ce vainqueur dont elle pénètre les faiblesses cachées, elle ne peut s'empêcher de l'estimer; aux yeux an la Cornélie de Garnier, César n'a consulté cju'ua

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