Page:Corneille Théâtre Hémon tome3.djvu/539

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ACTE V, SCE?îr: m. 193

Jft lui rends cet Élai quo j'ai sauvé pour lui,

Je cesse de régner; il commence aujourd'hui.

Ou'on ne me trait' plus ici de souveraine;

Voici votre roi, peuple, et voilà votre reine. <580

Vivez pour les servir, respectez-les tous deux,

Aimez-les. et mourez, s'il est besoin, pour eux.

Oronte, vous voyez avec quelle franchise .\e leur rends ce pouvoir dont je me suis démise : Prêtez les yeux au reste, et voyez les effets 1585

Suivre de point en point les traités de la paix.

(taoniee rerient avec une coupe à la main), ORONTE.

Votre sincérité s'y fait assez paraître, iMadanae, et j'en ferai récit au roi mon maître.

CLÉOPATRE.

L'hymen est maintenant notre plus cher souci.

L'usage veut, mon fils, qu'on le commence ici : 4590

Recevez de ma main la coupe nuptiale.

��Seulement on substitua plus tard sur à dans, comme dans le vers de Cinna, qu'U faut lire ainsi :

Pour monter dan$ le Irdne et nous donner des lois.

(V. 220.)

« Autrefois le mot trône désignait, soit simplement le siège royal et dans ce cas on disait : sur le iràne; soit toute la construction fermée plus ou moins par des balustres ou par quoique autre clôture, et contenant le siège ; ce second sens, qui explique très bien l'emploi des prépositims dans, en, hors de, est beaucoup plus fréquent que l'autre, non pas seulement chez Corneille, mais en général chez les écrivains de son temps. > (M. Marty-Laveaux.)

1583. Elle a raison, du moins en apparence, et l'on ne s'étonne pas qu'Oronte lui-même s'y kisse tromper. Ce ton cîaleureas et convaincu ferait illusion au plus fin diplomate. C'est dans ces parties de haute comédie que Cléopâtre ex- celle ; c'est par cette admirable possession de soi-même que son caractère est original, plus que par ses fureurs un peu monotones ; elle ne s'abandonne tout à fait que lorsqu'elle voit tout perdu; jusque-là, même d ins les moments les plus critiques, elle s'applique à i;arder son sang-froid, et y réussit le plus souvent.

L'Isa. « Pourquoi dit-on prêter l'oreille et que prêter les yeux n'est pas français? n'est-ce point qu'on peut s'empêcher à toute force d'entendre, en dé- tournant ailleurs son attention, et qu'on ne p?ut s'empêcher de voir, quand on « les yeux ouverts? » La distinction de Voltaire est fort inf<énieuse et vraie «ans doute ; mais Corneille emploie dans des acceptions très diverses le verbe ■prêter, auquel il donne toute l'étendue de sens du verbe \a.tin prcpstare : M. Marty- Liveaux dans son Lexique en fournit de très nombreux exemples. Dans l'Illu^ lion comique (Y, v), Corneille réunit en un seui vers les deux locutions entre> lesquelles Voltaire distingue :

Héme notre grand roi, ce foudre de la guerre.

Le front ceint de lauriers, daigne bien quelquefois

Prêter Faeil tt l'oreille au théàlre françois.

15^. Sur la toumnre *'y faire pnraîlr^ voyez la not« du v. IMl.

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