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2i2 KICOMÈDË

Que je vous fasse encor pour elle une demande.

Elle a nourri vingt ans un prince votre fils, Et vous pouvez juger des soins qu'elle en a pris Par les hautes vertus et les illustres marques Qui font briller en lui le sang de vos monarques. Surtout il est instruit en l'art de bien régner : C'est à vous de le croire, et de le témoigner. Si vous faites état de cette nourriture, Donnez ordre qu'il règne : elle vous en conjure. Et vous offenseriez l'estime qu'elle en fait. Si vous le laissiez vivre et mourir en sujet. Faites donc aujourd'hui que je lui puisse dire Où vous lui destinez un souverain empire.

��Les soins qu'ont pris de lui le peuple et le sénat 543

Ne trouveront en moi jamais un père ingrat :

Je crois que pour régner il en a les mérites.

Et n'en veux point douter après ce que vous dites;

Mais vous voyez. Seigneur, le prince son aîné,

537. Flaminiiis parle sérieusement ; mais, venant de lui, cette sorte de certificat de bon roi fait sourire, car c'est un certificat de servilité à l'égard de la politique' romaine.

530. Si vous faites état, si vous faites cas ; voyez le v. 1453. C'est une locution excellente, que Voltaire a raison de regretter.

Avez-vous su l'état qu'on fait île Curiace? {Horace, C15.)

Nourriture est ici pris dans le sens d'éducation, et l'était alors communément:

Tant ce qu'il a reçu (Vlicnreuse nourriture

Eiompte ce mauvais sang qu'il eut de la nature. {Béraclius, ll3o.)

u Si ma disgrâce leur a fait perdre des avantages du côté de la fortune, elle leur en a donne du côté de la bonne nourriture et de l'esprit. » (Bussy, Lettre à M'"" de Sévigné, 28 janvier 1G72.) Kn ce sens nourriture a vieilli, bien que J. J. Rousseau l'ait encore employé [Emile, Vil). Au v. 571 on retrouvera nour- riture dans un autre sens, également vieilli, celui de nourrisson, d'élèoe, en latin alumnus (alo).

541. Faire estime équivaut à faire état, c'est-i-dire à. faire cas, et le mot d'es- time, à estimation, appréciation. 11 est certain que dans l'usage actuel de la lan- gue, comme le remarque Voltaire, on dit plutôt avoir de l'estime que faire es- time; mais cette expression ne choquait pas les contemporains, et Corneille s'en est encore servi sans scrupule aux v. 7oo-7oG. — En, de lui, comme au v. 42.

544. Avec beaucoup de raison, M. Naudet remarque combien les pronoms in- discrètement jetés dans une phrase peuvent y porter de trouble et d'obscurité : le laissiez vivre (Attale), lui puisse dire (à Rome), lui destine: (à Attale).

547. Selon Voltaire, cette construction n'est pas française, et Lekain, élève do- cile de Voltaire, propose cette correction :

D'un roi digne du trône il a tous les mérite?. Le vers est familier, mais non pas si incorrect. 11 faut entendre : pour ce qui est de régner, il a tous les mérites d'un roi.

548. Var. El n'en veux point douter puisque vous me le dites. (IGol-iiC.)

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