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SUll HÉRACLIUS 17

Puisque Corneille le veut absolument, puisque tous les critiques sont d'accord avec lui sur ce point, il faut hien en convenir, //cra- clius est un poème ftcmharrassé». Nous aurions dit plus volontiers qu'il est un poème d'une rigueur logique singulière, d'une clarté abstraite, qui sollicite l'attention, mais la contente, comme un théorème bien déduit. L'exquise simplicité des pièces de Racine nous charme; c'est le régal du cœur et aussi des oreilles. Pourquoi la raison u'aurait-elle pas son plaisir propre? pourquoi ne le chercherions-nous pas, ce plaisir raisonnable, dans les détours d'une intrigue plus compliquée, au fond, que vraiment obscure? Est-ce qu'au moment même où il signale cette obscurité relative, Corneille ne fait pas une exposition très nette de la situation qui est le point de départ de son drame ? Et cette situation ne peut- elle pas être réduite à ces trois faits successifs, étroitement enchaî- nés l'un à l'autre :

Premier fait. — La gouvernante a sacritié Léonce, son propre lils, pour sauver Héraclius, le hls de l'empereur Maurice détrôné vX tué par Phocas.

Second fait. — Phocas reconnaissant confie à Léoutine son fils Martian, etLéontine, profitant d'une longue absence du tyran, sub- stitue à IMartian Héraclius, si bien que le fils de l'empereur Mau- rice passe pour le fils de l'usurpateur Phocas, tandis que le vrai lils de Phocas demeure près de Léontine, dont on le croit le fils.

Troisième fait. — Le vrai Martian (fils de Phocas, mais cru Léonce, fils de Léontine) aime Pulchérie, fille de Maurice, l'ancien em- pereur. Le vrai Héracliiss (fils de Maurice, mais cru fils de l'usurpa- teur Phocas) aime Eudoxe, fille de Léontine. Rien ne s'opposerait à cette double union si l'usurpateur, pour mieux affermir son trône, ne songeait à marier celui qu'il croit son fils à la fille de Maurice, dont le nom est encore populaire, c'est-à-dire, aux yeux du spec- tateur instruit de la substitution, à unir le frère et la sœur.

Dès lors, rien de mieux suivi que l'action qui s'engage, et l'ana- lyse de la pièce ne semble point si embrouillée.

Acte I. — Alarmé par le bruit de la résurrection d'Héraclius, ré- pandu dans le peuple, Phocas presse le mariage projeté entre son prétendu fils, qui est Héraclius lui-même, et la princesse Pulchérie. En digue fille de Jlaurice, celle-ci, cpii aime ailleurs, résiste et brave eu face le tyran. Avec plus de déférence apparente, Héra- clius n'est pas moins opposé à cette alliance ; mais ce n'est pas seulement parce qu'il en aime une autre, c'est parce qu'on lui a

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