Page:Corréard, Savigny - Naufrage de la frégate La Méduse, 1821.djvu/185

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
183
CHAPITRE VIII.

du pays couronnèrent les hauteur ; leur nombre était si grand qu’il inspira des craintes aux Français, qui aussitôt se formèrent en bataille sous les ordres d’un capitaine d’infanterie. Deux officiers se détachèrent et allèrent demander aux chefs des Maures quelles étaient leurs intentions, s’ils voulaient paix ou la guerre. On leur fit entendre que loin de vouloir agir comme des ennemis, ils s’offraient au contraire à procurer aux naufragés tous les secours qui étaient en leur pouvoir ; mais ces barbares déployèrent dans toutes les circonstances une perfidie qui n’appartient qu’aux peuples de ces climats. Lorsque le brick eut envoyé du biscuit à terre, ils eu pillèrent la moitié, et quelques instans après ils le vendaient au poids de l’or à ceux mêmes auxquels ils l’avaient dérobé. S’ils rencontraient quelques matelots ou soldats qui eussent eu l’imprudence de s’éloigner de la troupe, ils les dépouillaient entièrement et ensuite les maltraitaient. Il n’y avait que le nombre qui, leur inspirant de l’effroi, ne recevait d’eux aucune insulte. D’ailleurs il existe entre les chefs de ces peuples nomades et le gouvernement qui possède l’île Saint-Louis, un traité où il est stipulé qu’une forte récompense sera accordée aux Maures qui trouveront des naufragés dans le désert et les ramèneront au comptoir européen : l’intérêt guidait donc ces barbares ; et s’ils ramenaient les hommes égarés, ce n’était que dans l’espoir du prix qu’ils en attendaient.

Des femmes et de jeunes enfans inspiraient la pitié