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NAUFRAGE DE LA MÉDUSE.

des consolations et quelques adoucissemens ; car il comptait des amis parmi les officiers et passagers qui étaient au camp de Daccard. Il était dans cette disposition, et dans la triste situation qu’il vient de dépeindre, réduit à la ration de simple soldat, pendant les quarante jours qui venaient de s’écouler, lorsqu’il fit demander à un capitaine de la marine marchande américaine, s’il voulait lui faire le plaisir de le conduire au Cap-Vert, lieu où il devait se rendre. La réponse du capitaine fut affirmative, et le départ fixé à deux jours. Dans cet intervalle, le naturaliste Kummer eut occasion d’exprimer en présence du major Peddy, commandant en chef l’expédition anglaise pour l’intérieur de l’Afrique, les craintes que lui faisait concevoir le départ de son ami, et les inquiétudes que lui donnait, pour une santé aussi délabrée que l’était celle de M. Corréard, l’insalubrité du camp de Daccard, où il devait se rendre. À peine le sensible M. Kummer eut-il cessé de parler, que le major Peddy partit précipitamment, rentra dans son appartement, y prépara de suite du linge, des vêtemens et de l’argent. Pendant qu’il arrangeait ces différens objets, ce vrai philantrope versait des larmes sur le sort du malheureux qu’il ne connaissait pas, maudissant ceux qui l’avaient impitoyablement abandonné. Son indignation venait de ce qu’on lui avait assuré que depuis le départ du gouverneur français, M. Corréard n’avait plus entendu parler de lui, ni de ses compatriotes. Respectable major ! digne ami de l’humanité ! en partant pour l’intérieur de l’Afrique,