Page:Correspondance inédite (1870-1875) d'Arthur Rimbaud, 1929.djvu/22

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pouvait enfin dire : « Quand j’écris, ce n’est pas moi qui écris, je suis dicté[1]. »

Et l’éclatant brasier de tout son être a brûlé en deux ans plus que la durée d’une vie humaine, il a vécu en un instant le cycle de plusieurs générations. Son œuvre a été le passé, le présent et l’avenir jusqu’à la fin[2]. Dans un dernier élan, il a donné les premières révélations de l’Esprit jusqu’à la nouvelle mort. Et personne ne l’a compris. Et quand, ayant épuisé toute écriture jusqu’au dégoût épuisé lui-même jusqu’au fond de l’âme, il se tut, ce fut le silence de la fin du monde.

Il avait vu. Mais il n’était pas mort. Et le feu brûlait toujours en lui.

Juin 1871.

« Brûlez, je le veux tous les vers que je fus assez sot pour vous donner. »

  1. J’ai développé plus longuement ces idées dans « Après Rimbaud la mort des Arts ». (Numéro spécial du Grand Jeu consacré à Rimbaud avec textes inédits de Rimbaud, printemps 1929
  2. … du Parnasse, au symbolisme qu’il a inventé, jusqu’au surréalisme et au-delà.