Aller au contenu

Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 1.djvu/394

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
376
NOUVELLES LITTÉRAIRES

homme obscur et dont les talents étaient assez bornés. Son ouvrage est exact pour les recherches, mais il manque d’agrément. L’éloquence insinuante, les mœurs douces, la politesse agréable, la magnificence noble du cardinal de Rohan, firent le sujet du troisième éloge. Les fleurs y furent répandues, peut-être avec un peu de profusion, mais on les jetait sur des cendres qui ont été arrosées des larmes de la France entière. M. le cardinal de Rohan était l’idole de tous ceux qui le connaissaient. On termina cette séance par la lecture d’un mémoire sur la ville d’Herculée ; on fit un parallèle fort agréable et fort savant des belles choses qu’on y a découvertes avec les antiques dont on est en possession depuis longtemps.


LXI


On vient de nous donner en trois volumes une Histoire des révolutions de Gênes jusqu’en 1748[1]. L’auteur a un style net, assez élégant, mais faible et sans couleur. Il narre assez bien, mais il ne fait que narrer, et un peu de politique serait nécessaire dans une histoire dont les faits sont assez peu intéressants et se ressemblent presque tous. Un écrivain adroit aurait fait voir comment les révolutions de l’histoire qu’il écrit avaient influé dans les affaires générales ; cela aurait ôté à son ouvrage un air sec et maigre qui ennuie le lecteur. Comme le projet de l’historien n’est que d’écrire des révolutions, l’ouvrage a un air décousu qu’il pouvait éviter avec un art qu’il n’a point du tout. La conjuration de Fiesque est le morceau le plus curieux et le plus approfondi de l’histoire que je vous annonce. L’auteur n’a fait presque que copier ce que le cardinal de Retz en avait si bien écrit autrefois. Je ne vous parle pas de la dernière révolution dont nous venons d’être les témoins ; nous en savons beaucoup plus que l’historien n’en a osé dire. Sa relation n’est pas plus curieuse que les gazettes. Voici deux faits singuliers qui m’ont frappé dans l’histoire de Gênes.

  1. Par de Bréquigny. Paris, 1750, 3 vol.  in-12. Nouvelle édition augmentée, 1752, 3 vol.  in-12.