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Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 1.djvu/408

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NOUVELLES LITTÉRAIRES

adore comme un héros. La versification de cet ouvrage paraît dure à beaucoup de gens, les inversions hasardées, le dialogue obscur. Les maximes qui ont fait le succès de cet ouvrage sont assez heureuses, quelquefois fausses et presque toujours déplacées. Des personnages agités de violentes passions ne s’avisent pas de lâcher des sentences.

M. Marmontel a mis à la suite de son ouvrage des réflexions sur la tragédie ; le plus grand nombre se trouve partout. Quelques-unes plus neuves sont copiées de M. de Voltaire. L’auteur en a hasardé de particulières qui vont à sa manière d’écrire. Il prétend, par exemple, qu’on ne peut guère réussir aujourd’hui dans la tragédie que par des situations ; cela est faux, mais l’auteur a intérêt que cela soit vrai, et il appuie sur cela avec une vivacité qui le trahit.

— Le nouvel opéra de Zoroastre continue à attirer beaucoup de monde et à essuyer des contradictions. Je m’y trouvais il y a quelques jours à côté d’un Anglais. Il demanda une place aux balcons, aux loges, à l’amphithéâtre, à toutes les places où un galant homme peut être placé avec bienséance. Comme on lui répondait toujours que toutes les places étaient prises, il dit : « Je n’entre pas dans une maison que je n’entende dire des horreurs de cet opéra ; j’y viens dix fois de suite et je ne puis pas y trouver de place ; il n’y a que les Français au monde capables de ces contradictions. »


LXIV


Il paraît depuis quelques jours un roman intitulé Favoride[1]. Cet ouvrage, mystérieusement annoncé d’abord comme le fruit des réflexions du président de Montesquieu, donné ensuite à M. Duclos, est enfin resté à M. le marquis du Châlet, lieutenant général des armées du roi. Rien n’est si simple que le plan de ce livre. Favoride, fille naturelle d’une princesse et née avec tous les agréments de la figure, tous les charmes de l’esprit,

  1. Inconnu aux bibliographes.