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Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 1.djvu/410

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NOUVELLES LITTÉRAIRES

comme la fille d’un paysan. Mme de Rambel, femme riche et de condition qui l’y voit, prend du goût pour elle, l’adopte en quelque manière pour sa fille, et la met dans un couvent pour lui procurer de l’éducation. M. de Tréleux, amant de Mme de Rambel, a les mêmes yeux qu’elle pour Émilie, et par le canal d’une sœur religieuse qu’il a dans la communauté où se trouve cette jeune personne, il l’instruit d’abord et l’entretient de son amour. Sur ces entrefaites, il est forcé de partir pour son régiment, et Mme de Rambel, qui s’est aperçue qu’elle avait une rivale, commence par la haïr, continue par la persécuter et veut finir enfin par la marier. Avant que ce projet ait pu être exécuté, M. de Tréleux revient à Paris. Il s’était flatté d’avoir inspiré de l’amour à Émilie, et ne lui avait inspiré que de l’amitié. Il croit la servir en adoptant les idées de Mme de Rambel, et il trouve un jeune homme aimable, à qui on fait un sort heureux et commode pour le déterminer à épouser Émilie. Une terre de Mme de Rambel est choisie pour le lieu de la cérémonie ; mais la nuit du jour où se devait passer cette scène, Émilie s’enfuit avec le chevalier d’Armille, amant qu’on ne lui connaissait pas. Verceuil, c’est le nom du jeune homme destiné à Émilie, suit le ravisseur, l’atteint et le tue ; Émilie, de son côté, tue Verceuil. Le marquis de Tréleux, qui se rendait dans cet instant chez Mme de Rambel après avoir appris que Verceuil était son fils, le trouve mort, et par des éclaircissements qu’on tire de la femme qui avait élevé Émilie, il vient à connaître qu’elle est sa fille.

Il y a moins d’esprit et de philosophie dans ce roman que dans Favoride, mais plus de faits, d’ordre et de naturel. La catastrophe, qui devrait être terrible, ne fait point d’effet, parce qu’elle n’est point préparée. Les éclaircissements et les reconnaissances se font d’une manière qui refroidit l’intérêt. La Marianne de Marivaux me paraît avoir donné l’idée d’Émilie, mais la copie est infiniment au-dessous de l’original.

— Vous connaissez les opéras italiens de l’abbé Metastasio, écrivain diffus, mais délicieux, et qui joint à beaucoup d’élégance et de délicatesse, du sentiment et du pathétique. Le feu abbé Desfontaines donna, il y a quelques années, en notre langue, un de ces opéras qui n’eut point de succès. L’abbé Bonnet a publié, l’été dernier, avec le même désagrément, un