Aller au contenu

Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 15.djvu/438

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas susceptibles d’un extrait. Parmi cette foule de fictions d’un esprit en délire, il en est une cependant qui mérite d’être distinguée, c’est l’épisode de la demoiselle Oliva, de cette fille que Mme de La Motte avait choisie pour représenter la reine dans les bosquets de Versailles, et dont la découverte presque miraculeuse a jeté un si grand jour sur toute cette abominable intrigue. Mme de La Motte prétend que c’est encore la reine qui, pour jouer le cardinal et sans autre motif que celui de s’amuser à ses dépens, voulut qu’elle lui donnât en son nom un rendez-vous dans le parc de Versailles et chargeât quelqu’un de la représenter ; que le cardinal, instruit par Mme de La Motte de cette ingénieuse supercherie, ne s’y prêta que parce qu’il ne voulait pas contrarier cette fantaisie de la reine et crut lui plaire en faisant semblant de croire à la réalité de sa présence à ce rendez-vous. La reine, cachée derrière des charmilles, entendit le cardinal se répandre, aux pieds de la demoiselle Oliva, en excuses sur sa conduite, sur ses emportements, et lui promettre de solliciter à l’avenir avec moins d’impatience l’accomplissement de ses projets ambitieux. Elle vit dans cet instant la demoiselle Oliva tendre son pied au cardinal qui le couvrit de baisers, et ce fut au moment où l’esclave soumis voulut obtenir des gages plus certains de sa réconciliation que la reine fit du bruit et envoya Mme de La Motte pour prévenir Son Éminence, qui paraissait vouloir mettre à fin l’aventure, que Madame et Mme la comtesse d’Artois s’approchaient. C’est avec des moyens de cette vraisemblance que Mme de La Motte tâche de concilier l’absurdité des faits qu’elle invente avec les dépositions de la demoiselle Oliva, principal instrument de son détestable complot.

Mme de La Motte ne se tire pas mieux du fait des diamants qu’il est prouvé que son mari vendit en Angleterre. Ce fait, si constant au procès, était aussi trop difficile à pallier, et nous croyons que ce n’est pas la partie de son roman qui lui a coûté le moins à imaginer. Mme de La Motte déclare que jusque-là tous les bienfaits de la reine s’étaient montés seulement à une somme de vingt mille livres une fois payée ; que depuis quelque temps elle s’était aperçue que le goût de la reine pour elle s’éteignait, lorsqu’un jour cette princesse la fit mander, la reçut avec une froideur encore plus marquée, lui remit une boîte dans laquelle étaient renfermés cent mille écus de diamants, et la con-