Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 7.djvu/179

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réponse de Mme  geoffrin

à une lettre que m. l’abbé de breteuil,
chancelier de m. le duc d’orléans, lui avait écrite à varsovie.

(Nota que M.  l’abbé de Breteuil a une écriture très-difficile. Il fait des ronds, et prétend former des lettres ; il écrit comme les autres effacent.)


« En voyant le griffonnage, plus griffonnage qu’on ne peut dire, de mon délicieux voisin, j’ai dit : On voit bien la peine qu’il s’est donnée pour que cela fût parfait en son genre. On m’avait annoncé ce chef-d’œuvre en m’apprenant que vous aviez fait tailler une plume pour vous surpasser. Hélas ! il ne fallait pas vous donner tant de peine ; la patte du premier chat qui serait tombée sous la vôtre était tout juste ce qu’il fallait.

« Pour donner à cette belle pièce toute la célébrité qu’elle mérite, je l’ai étendue sur une table, et j’ai crié : Accourez tous, princes et princesses, palatins et palatines, castellans[1] et castellanes, starostes et starostines, enfin, peuples, accourez ; voilà un hiéroglyphe à expliquer, et dix ducats à gagner. Tous les états sont arrivés, et mes ducats me sont restés. Je n’avais pour toute ressource que les sorciers ; mais ceux de ce siècle le sont si peu que j’aurais encore perdu mon temps. Tout simplement je me suis adressée à mon cœur ; ce cœur si clairvoyant, qui sent si finement tout ce qui est fait pour le toucher, a deviné tout de suite que ce qui était illisible pour les yeux était très‑lisible pour lui. Il m’a assuré que ces pieds de mouche exprimaient des témoignages très-tendres de l’amitié de mon délicieux voisin. J’ai chargé ce bon déchiffreur de vous répondre d’un parfait retour de ma part. »


15 novembre 1766.

M. Dorat a publié, il y a quelques années, un Essai d’un poëme didactique sur la Déclamation théâtrale. Cet essai ne fit point de sensation. Il vient de faire réimprimer ce poëme en trois chants, et par conséquent fort augmenté, et précédé d’un

  1. Nom donné autrefois en Pologne aux dignitaires qui venaient après les palatins. (Littré.)