Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 7.djvu/252

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tulée Abrégé chronologique, ou Histoire des découvertes faites par les Européens dans les différentes parties du monde. Douze volumes in-12 assez gros. C’est proprement l’histoire de la navigation, tirée de différents voyageurs, depuis Christophe Colomb jusqu’à nos jours. Bon livre pour une bibliothèque de campagne. Il vaut toujours infiniment mieux s’amuser de ces sortes de lectures que de plats et mauvais romans.

— Parlez-moi de M.  Muyart de Vouglans, avocat au Parlement, qui vient de publier une Réfutation des principes hasardés dans le Traité des Délits et des Peines. Brochure in-12 de cent vingt pages. Cet honnête avocat fait l’apologie de la cruauté de notre jurisprudence contre la douceur des principes du marquis Beccaria, à peu près comme l’abbé de Caveirac fit, il y a deux ans, l’apologie de la Saint-Barthélemy. Et vous voulez que j’espère quelque chose de l’esprit public, quand je vois d’un côté des magistrats enfants élever une voix faible que personne n’écoute, et, de l’autre, des hommes atroces plaider ouvertement, avec approbation et privilège, contre les premiers principes de l’humanité ! Ce Muyart de Vouglans passe dans son corps pour un bon criminaliste. Je lui donne ma voix pour être nommé à la première occasion adjoint de maître Charlot, bourreau de la ville, vicomté et banlieue de Paris, et je lui donne pour valet son infâme censeur, qui a osé dire, dans son approbation, que l’impression de cet ouvrage sera très-utile au public. On trouve au commencement de cet horrible écrit douze pages de propositions prétendues condamnables, tirées du livre Des Délits et des Peines, et contraires, suivant l’auteur, aux maximes sacrées du gouvernement, des mœurs et de la religion. Une de ces propositions abominables de M.  Beccaria, c’est qu’on doit abolir l’usage de la torture. Voilà les horreurs que l’auteur de la Réfutation ose déférer à l’animadversion du ministère public. Vous me demanderez si M.  Muyart de Vouglans, pour récompense de sa belle réfutation, a été fouetté, marqué, et envoyé aux galères ? Car c’est le premier prix qui s’offre à l’imagination pour récompense de tant de douceur et d’humanité. Point. On ourraîit croire du moins que les avocats l’auront rayé de leur tableau ? Point du tout ; et l’on peut penser, pour sa consolation, que ce digne jurisconsulte, après avoir fait preuve publique de sa science dans les matières criminelles, restera avocat consul-