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MAI 1767.

Grand Vocabulaire français#1 qui doit former vingt volumes in-4°. Les souscripteurs payeront dix livres par volume, et auront l’avantage de recevoir le cinquième, le dixième, le quinzième et le vingtième gratis. Ce ne sera pas seulement un ouvrage de grammaire contenant tous les mots de la langue française, mais un livre de science renfermant des définitions et des notions exactes et concises ; c’est-à-dire que les compilateurs présenteront un abrégé de l’Encyclopédie et de tous les autres grands dictionnaires. Cette entreprise pourrait avoir son utilité, mais ce serait un ouvrage digne d’une excellente tête philosophique, et l’on ne sait quelle est la société des gens de lettres qui s’en est chargée. Il est vrai que M. Capperonnier, garde de la Bibliothèque du roi, en sa qualité de censeur, fait un éloge magnifique de cette entreprise, et que ce savant est bien en état de l’apprécier ; mais il reste toujours à craindre que l’amitié et l’envie de rendre service n’aient dicté la plus grande partie de son éloge. Il me semble du moins que ceux qui ont vu l’échantillon de ce grand vocabulaire n’en ont pas été contents. On dit que M. l’abbé Georgel est un des principaux travailleurs. C’est un ex-jésuite qui a de l’esprit, et que M. le prince Louis de Rohan, coadjuteur de Strasbourg, avait chez lui en qualité de théologien, mais que les derniers arrêts du Parlement contre la Société ont obligé de s’éloigner de Paris. Si j’ai bien compris, on ne doit tirer que six cents exemplaires de ce Grand Vocabulaire français.


15 mai 1767.

On a souvent vanté, comme un avantage particulier à notre siècle, cette liaison qui s’est établie entre les gens de lettres et les gens du monde, et les agréments qui en ont résulté pour la socièté. On a prétendu que les gens du monde en ont pris du goût pour l’instruction, et que le savoir et le génie y ont appris le secret de se montrer sous des dehors plus séduisants et plus aimables. Il ne m’est pas encore bien démontré que [1]

  1. Cette publication, qui eut lieu de 1767 à 1774, forme 30 volumes. Barbier ne nomme pas l’abbé Georgel parmi les collaborateurs, mais il cite Chamfort et La Chesnaye des Bois. Il signale également deux études critiques sur cette entreprise par Midy, de l’Académie de Rouen, et par un médecin nommé Savary.