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CORRESPONDANCE LITTÉRAIRE.

A tousQui caractérisent la France :
Permis à chaque acteur, lorsque maint créancier
Sera venu trois fois à sa porte aboyer,
A D’être malade. Alors quelque duchesse
(Car il faut qu’une au moins pour chacun s’intéresse)
Voudra bien du public s’attirer le mépris,
Et quêter noblement chez princes et marquis,
A tousQui nous feront par politesse
A tousUne aumône de dix louis.
Observons toutefois qu’avec exactitude
Chacun aura le droit d’user de ce détour.
Entendons seulement qu’à compter de ce jour,
Désirant épargner jusques aux honoraires,
Le Suisse et le moucheur auront aussi leur tour.
A tousRisque à passer pour nos confrères.



XIX.



A Après avoir consulté Coqueley[1],
A tousHomme prudent et raisonnable,
Qui nous a fait sentir qu’il était indiscret
De joindre à la bassesse un orgueil intraitable ;
A tousQue malgré nos airs de hauteur,
A tousLe public toujours équitable
Rabaissait notre état à sa juste valeur ;
A Que, quoiqu’on fit un métier méprisable,
On n’avait pas le droit de manquer à l’honneur,
A tousNi même à la reconnaissance :
Nous saurons désormais respecter les auteurs,
A Et d’eux à nous faire la différence.
Nous les regarderons comme nos bienfaiteurs :
La gloire est leur seul but, le nôtre est l’infamie ;
Nous sommes les échos de leur brillant génie ;
Automates glacés, organes impuissants,
Nous oublierions sans eux que nous avons des sens.
Quand les cheveux épars et la bouche écumante,
A Le front terrible et les yeux egarés,
Sous le nom d’Apollon, la sibylle éloquente
Rendait en frémissant ses oracles sacrés.
On voyait de son cœur l’involontaire ivresse.
On rendait grâce aux dieux et non à la prêtresse.
A Bien convaincus de cette vérité,
A tousEt connaissant son importance,
A tousUn de nous sera député
A Pour faire excuse avec humilité

  1. Avocat et conseil de la Comédie-Française. (Grimm.)