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CORRESPONDANCE LITTÉRAIRE.

tous ses adorateurs par ses caprices, et que Lucile fait tout juste autant de conquêtes que sa sœur en perd. Mais Lucile n’en est que plus à plaindre, car son père s’est fait un loi inviolable de ne la point établir avant sa sœur aînée ; et si celle-ci ne trouve pas enfin un homme à son gré, et qui puisse à son tour s’accommoder de son humeur altière, Lucile court risque de vivre et mourir vierge, et de ne couronner la constance d’aucun de ses amants.

Deux amis de province, c’est la seule qualité que l’auteur leur donne, viennent de temps en temps passer huitaine en ce château… J’approche autant que je peux des expressions de l’auteur… L’un s’appelle Fernand ; c’est un garçon doux, tendre, aimable, que M. le baron aime d’autant plus particulièrement qu’il est le fils d’un ancien ami. L’autre, qui porte le nom de Melcour, est à l’extérieur plus léger et plus petit-maître, mais au fond, un garçon solide. Il est temps de commencer la pièce, ainsi, levons la toile. Lisette, la femme de chambre des deux sœurs, vient pour ranger le salon où l’on voit des papiers de musique, des tables, des chaises, et surtout un métier. Pendant qu’elle range et qu’elle fait le portrait de ses deux maîtresses, elle entend une voiture entrer dans la cour. Ce sont les deux amis de province qui arrivent. Fernand ne tarde pas à paraître. À son dernier voyage, il a engagé Lisette à mettre à une loterie. Son numéro, c’est 117, a porté ; elle a gagné une belle bague de diamants : Fernand la lui apporte, et reprend le billet de loterie. Tournure neuve, de laquelle l’auteur s’est sûrement beaucoup félicité, et que les galants pourront mettre en usage quand ils voudront faire des présents aux chambrières. Lisette, ayant gagné à la loterie, n’en est que plus disposée à servir Fernand. Celui-ci lui découvre sa passion pour Lucile, la cadette des deux sœurs. Lisette trouverait cette passion très à sa place ; mais la résolution du baron de ne marier Lucile que lorsque sa sœur sera établie lui paraît un obstacle d’autant plus insurmontable que les adorateurs de Zélie ont tous quitté la partie.

Lucile survient, et Lisette, pour sonder ses dispositions à l’égard de Fernand, lui fait accroire que celui-ci vient pour épouser sa sœur. Cela donne de l’humeur à la jeune personne. Elle en a pour la première fois, preuve certaine que son cœur est touché par