Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 7.djvu/90

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il vient d’être nommé de l’Académie des inscriptions et belles‑lettres, et il n’est pas permis aux membres ordinaires de l’Académie de concourir pour le prix. La vue du comte de Caylus n’était vraiment pas fausse. Si nous connaissions à fond l’Égypte, nous posséderions la clef de tous les arts et de toutes les sciences des Grecs. Malheureusement les monuments manquent partout, et ce qui est parvenu jusqu’à nous est si imparfait, si plein de lacunes, si obscur et si inexpliquable, qu’il ne faut pas se flatter de pouvoir jamais en tirer les éléments de la véritable histoire du genre humain. C’est pourtant à quoi nous mènerait une connaissance bien approfondie de l’Égypte. J’oublie, il est vrai, que l’Académie des inscriptions possède deux hommes qui ne restent jamais court sur l’Égypte, qui la connaissent comme je connais ma chambre, et qui se croiraient personnellement offensés de mes doutes. J’en demande donc pardon à M.  de Guignes et à M. l’abbé Barthélemy ; mais quand ils m’auront certifié avoir fait leur noviciat, il y a trois ou quatre mille ans, dans quelque séminaire de Memphis, et surtout avoir eu quelque part dans la confiance des prêtres égyptiens, les plus cachés de tous les hommes, je les écouterai avec docilité, et j’adopterai sans scrupule toutes les importantes découvertes qu’ils voudront bien me transmettre.

— Si la lecture de l’Histoire de l’Orléanais, par M.  le marquis de Luchet[1], ne vous a point assommé, vous pouvez d’abord vous vanter d’avoir la vie dure ; et puis les Essais du même auteur sur les principaux événements de l’histoire de l’Europe[2] vous donneront le coup de grâce. Ces Essais forment deux petites parties. La première est consacrée à l’illustre Élisabeth, reine d’Angleterre. Vous avez déjà lu ce barbouillage sous un autre titre ; il est seulement ici plus étendu. L’auteur soupçonne qu’Élisabeth, tout en établissant le protestantisme en Angleterre, pourrait bien au fond n’avoir été ni catholique ni protestante. Vous voyez que M.  de Luchet est fin comme l’ambre. Sa seconde partie sert à éplucher le caractère de Philippe II, roi

  1. Voir tome VI, page 507.
  2. Essais historiques sur les principaux événements de l’Europe, 1766, 2 part. in-12, Le premier volume avait déjà paru l’année précédente, sous le titre de Considérations politiques et historiques sur l’établissement de la religion prétendue réformée en Angleterre. (T.) — Voir tome VI, page 267.