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SEPTEMBRE 1768.

nombre d’officiers qui ont servi sous lui, et j’avoue que le témoignage de M. Bossu contre lui lui fait dans mon esprit, malgré que j’en aie, un tort irréparable. Mais ce M. de Kerlarec a pour lui les bureaux de la marine, et il faut encore convenir que ce ne serait pas le premier fripon qui aurait trouvé de la protection dans ces bureaux. On a mis M. Bossu à la Bastille pour le mal qu’il a dit de M. de Kerlarec ; mais cette punition n’a altéré ni sa bonne humeur ni sa véracité. Il est sorti de cette demeure royale au bout de six semaines, tout aussi gaillard qu’il y était entré ; au reste cette punition était très-injuste. M. Bossu s’était soumis pour l’impression de ses voyages à tous les règlements de la librairie. Son livre a paru avec approbation et privilège du roi ; s’il y était resté quelque chose de répréhensible, c’était au censeur à en répondre[1].



OCTOBRE

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1er octobre 1768.

Ce jourd’hui 1er octobre, l’an de grâce mil sept cent soixante-huit, moi soussigné, maître bavard en philosophie et en littérature, faiseur de feuilles chambreland, faisant plus de feuilles que personne, mais n’en tenant magasin que pour l’usage de quelques grands et augustes personnages de la partie septentrionale de l’Europe, ayant été sommé de comparoir par-devant messire Augustin Testart Dulys, conseiller du roi en ses conseils, lieutenant criminel au Châtelet de Paris, pour rendre témoignage sur aucuns faits résultants d’un procès criminel intenté à l’occasion d’un enlèvement arrivé, le 14 du mois passé, sur le théâtre de la Comédie-Française, entre sept et huit heures de relevée, je susdit soussigné me suis transporté à l’audience dudit magistrat, lequel j’ai trouvé siégeant d’un air un peu blême

  1. On trouve au numéro XIV de l’Année littéraire de 1768 une lettre datée du 4 mai, où l’on attribue les accusations de Bossu à l’animosité qu’il avait conçue contre le gouverneur pour avoir été renvoyé en France comme mauvais sujet. Mais cette réfutation anonyme ne détruit aucune des imputations précises de Bossu. (T.)