met le nouveau Russe un peu au fait des mœurs de l’Opéra de Paris. Il s’ensuit que Mme Reich, à cause de l’austérité de ses principes, qui en font un dragon de vertu, est oubliée, négligée par le parterre de l’Opéra, quoique ce soit une des plus illustres, des plus respectables et des plus charmantes personnes de l’Europe. Figurez-vous tout cela rapporté en style héroïco-emphatico-pathético-poétique. Il y a longtemps que je n’ai rien vu de si ridicule que cet hommage rendu publiquement à Mme la chanteuse Reich ; ses camarades, nos demoiselles de l’Opéra, ne manqueront pas d’en dire de bonnes.
— Les vers que vous allez lire ont été adressés à Mme la comtesse du Barry. On voit, du reste, qu’on a voulu parler de M. le duc de Choiseul sous le nom d’Ulysse. Il me semble que ces vers n’ont déplu à personne ; malgré cela, l’auteur n’a pas jugé à propos de se faire connaître.
Déesse des Plaisirs, tendre mère des Grâces,
Pourquoi veux-tu mêler aux fêtes de Paphos
Les noirs soupçons, les fâcheuses disgrâces,
Et pourquoi méditer la perte d’un héros ?
Ulysse est cher à la patrie,
Il est l’appui d’Agamemnon[2] ;
Sa politique active et son vaste génie
Enchaînent la valeur de la fière Ilion[3].
Soumets les dieux à ton empire,
Vénus sur tous les cœurs règne par ta beauté ;
Cueille, dans un riant délire,
Les roses de la volupté ;
Mais à nos vœux daigne sourire,
Et rends le calme à Neptune agité.
Ulysse, ce mortel aux Troyens[4] formidable,
Que tu proscris dans ton courroux,
Pour la beauté n’est redoutable
Qu’en soupirant à ses genoux.