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Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 9.djvu/468

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tions et belles-lettres lui confère, par acclamation, la première place vacante et l’enregistre parmi ses membres comme duc, pair, prince, marquis, comte, vicomte, juveigneur, vidame, chevalier, avoué, haut baron, second baron, troisième baron ; car toutes ces qualifications vont lui passer par la mort de son père. Il serait à propos aussi de fonder et d’ériger une chaire dont le professeur ne ferait autre chose toute l’année que d’expliquer à la jeunesse le billet d’enterrement de M. le duc de La Vauguyon ; sans quoi il est à craindre que l’érudition nécessaire pour le bien entendre ne se perde insensiblement, et que ce billet ne devienne avec le temps le désespoir des critiques. Le terme de juveigneur, par exemple, est peu connu. On appelle ainsi un cadet apanagé ; M. le duc d’Orléans est juveigneur de la maison de France. Ce mot est peut-être une corruption du mot junior, dont les Césars du Bas-Empire appelaient ceux qu’ils associaient à l’Empire. Sans le billet d’enterrement de M. de La Vauguyon, le terme de juveigneur allait se perdre dans l’obscurité des temps. Eh bien ! malgré cet étalage imposant de titres de toute espèce, il s’est trouvé des gens assez difficiles pour disputer à M. de La Vauguyon presque jusqu’au titre de gentilhomme, et pour soutenir (chose dont je suis fort loin de convenir avec eux) qu’il descend d’un chirurgien dont le fils a eu assez d’adresse ou de bonheur, ou, si vous voulez, de mérite, pour épouser l’héritière de la maison de Saint-Mégrin, et pour s’enter sur cette tige illustre ; et ils prétendent qu’il n’y a guère plus de cent ans, puisque cela s’est fait dans la minorité de Louis XIV. Si cela était, les mauvais plaisants diraient qu’il manque encore quelques qualifications au billet d’enterrement. Ils ont dit pour les places que M. de La Vauguyon a occupées, qu’il ne suffit pas d’être l’avoué de Sarlac, qu’il faut encore être l’avoué de la nation. La dénomination de grand-maître de la garde-robe est une usurpation qui a été relevée dans la Gazette de France par ordre de la cour. Il n’y a que les grandes charges de la couronne qui aient le droit exclusif de s’appeler grand-maître, grand-écuyer, grand-veneur, grand-chambellan, etc. Ceux qui ne servent pas la personne du roi, ceux qui sont attachés aux princes de la maison royale ne jouissent que du titre de premier maître, premier écuyer, premier veneur, etc.