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gérait dans vos yeux pour y chercher le chemin de votre cœur ; — vous l’entendriez se plaindre de la banalité de l’amour des hommes, et c’est elle qui présente l’encensoir pour que chacun y jette l’encens ; — elle vous dirait que sa vie n’est qu’un combat, quand c’est elle qui cherche la lutte, heureuse des ravages qu’elle produit et des esprits qu’elle enchaîne ; elle ignore que la modestie est la meilleure des garanties et que le regard d’une femme vertueuse fait baisser les regards les plus audacieux. Avez-vous des femmes coquettes à Yédo ?

— Des femmes coquettes ! fort peu ; mais quand par malheur elles s’avisent de l’être, nous les enfermons.

La plupart des femmes qui nous entouraient avaient le haut du corps presque nu, et, comme j’allais demander à Francœur l’explication de cette coutume bizarre, l’une d’elles passa près de nous souriante et penchée sur son danseur ; elle était outrageusement décolletée !

— C’est la mode, me dit Francœur.

— La mode !

— Oui ; la mode, vertueux Japonais, est une loi qui, chez le peuple le plus spirituel de la terre (c’est nous qui l’affirmons du moins), règle les diverses manières de se bien vêtir.

— De ne pas se vêtir du tout, veux-tu dire ?

— Vous allez voir. Cette loi, plus inconstante que la fortune plus légère que le caprice qui l’inspire, plus tyrannique, plus cruelle que les arrêts d’un sultan