Page:Cosquin - Les Contes indiens et l’Occident, 1922.djvu/19

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une condition nouvelle . Je veux du musc-le-plus-capiteux. — Ma fille, chasse par des malédictions le démon qui t’inspire cet entêtement. — Je n’en ferai rien. Je ne me marierai que si j’ai de ce musc. »

« Où est le conseiller ? Conseiller, que faut-il faire ? — Celui qui t’a procuré les perles te procurera le musc. » Le Sultan fit venir le fils du marchand. «Tu vas m’offrir du musc-le-plus-capiteux en présent ou bien tu auras la tête tranchée, c’est décidé ! — Bien. » Il sortit et courut auprès de Rubis. « Pourquoi le Sultan t’a-t-il mandé ? — Voici l’affaire. — C’est chose facile. » Elle écrivit un billet. « Retourne à l’endroit où tu as porté le premier. Crie : Père Sa’dàn ! Un nègre gigantesque sortira de la mer, avec une barbe blanche qui lui tombera jusque sur le ventre. Remets-lui ceci sans parler et attends. S’il reparaît aussitôt après avoir plongé, tu sauras que tu as trois jours à attendre ; sinon, dès ce jour-là même, tu rapporteras ce que tu cherches. »

Arrivé sur le rivage, il cria : « Père Sa’dân ! » Un nègre gigantesque apparut. Sa barbe était blanche comme la neige et descendait jusque sur son ventre. Il lui tendit le billet. L’autre plongea. Une tente sur-le-champ se dressa avec une table chargée de toutes sortes de mets. Le troisième jour, il observait la mer, quand il aperçut une litière, et, derrière elle, dix jeunes filles portées aussi sur des litières. Deux nègres marchaient aux deux côtés de celle de la mariée. « Seigneur, lui dit le nègre, les biens de l’Orient viendront à toi, les biens de l’Occident viendront à toi. Voici Musc-le-plus-capiteux, fille du second Vizir. Elle est entre tes mains. Suis ta route, tu nous trouveras là-bas. »

Quand il arriva à son château, il entendit les chanteuses qui frappaient sur leurs instruments. Musc-le-plus-capiteux trônait comme le font les mariées le jour de leurs noces. « Entre à l’étuve, lui dit Rubis. Prends des habits neufs pour ton mariage. » Il se baigna, se changea. Des mets de toutes sortes circulèrent. Et il entra en marié cette nuit-là auprès de Musc-le-plus-capiteux. Trois jours durant il vécut dans la liesse, puis Rubis lui dit : « Écoute mes recommandations. Je vais appeler en ta présence Musc-le-plus-capiteux. Je vais la gourmander et lui faire honte. « Comment, lui dirai-je, depuis trois jours que tu es mariée, tu n’as pu te rendre aux bains, sale, malpropre ? » Pour toi, tu te garderas de souffler mot. Mais quand elle s’y rendra avec les masseuses, tu t’approcheras de la porte de l’étuve que tu entr’ouvriras et tu sentiras un peu son odeur. »