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les voies de l’amour

prendre au début de sa pratique dans des familles pauvres, malpropres, sur des tables boiteuses, crasseuses, avec des couteaux ébréchés presque sans manche, avec des cuillers en étain dont l’usure en dents de scie déchirait la bouche, sur des tables où parfois des petites vermines couraient en zigzaguant. Et puis que mangeait-il du bout des lèvres ? Une soupe maigre sur laquelle surnageaient quelques pois ou quelques grains de riz, du pain dur à se briser les dents et du beurre ranci. Et malgré les haut-le-cœur il lui fallait faire bonne contenance pour ne pas froisser les pauvres malheureux qui étaient assez bons de l’appeler à leur secours, et assez charitables de lui offrir ce qu’ils croyaient pouvoir le réconforter. Bienheureux encore était-il quand, dans les confitures qu’on lui offrait, il n’y avait pas autant de mouches que de fruits.


Les heures passaient et personne ne voyait marcher les aiguilles de la grande horloge dont le tic-tac n’était pas plus perçu. Les conversations étaient toujours aussi bruyantes ; les sujets en étaient variés. On décrivait les scènes gaies et tapageuses de l’Académie de Musique où l’on allait entendre la divine Sarah ou les fameux Coquelin et tous les artistes qui nous venaient de France. On refaisait les promenades de l’après-midi avec le monde fashionable sur les rues St-Jacques et Notre-