Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 12.djvu/93

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l’abandonnèrent, elle ne douta plus que Smoloff ne l’eût entièrement oubliée ; et plus d’une fois elle versa sur cette pensée des larmes amères, dont la plus pure innocence n’aurait pu lui faire un reproche.

Vers la fin d’avril, un soleil plus doux venait de fondre les dernières neiges, les îles sablonneuses des lacs commençaient à se couvrir d’un peu de verdure, l’aubépine épanouissait ses grosses houppes blanches, semblables à des flocons d’une neige nouvelle, et la campanule avec ses boutons d’un bleu pâle, le vélar qui élève ses feuilles en forme de lance, et l’armoise cotonneuse, tapissaient le pied des buissons. Des nuées de merles noirs s’abattaient par troupes sur les arbres dépouillés, et interrompaient les premiers le morne silence de l’hiver ; déjà sur les bords du fleuve voltigeait, çà et là, le beau canard de Perse, couleur de rose, avec son bec noir et sa huppe sur la tête, qui, toutes les fois qu’on le tire, jette des cris perçants, même lorsqu’on l’a manqué ; et dans les roseaux des