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byzance

Tertullien dans son indignation « ainsi que les scorpions des bords du Nil au soleil de l’été ».

Quoiqu’il en soit dans l’empire byzantin, le trône et l’autel allèrent s’« asiatisant » chaque jour d’avantage. En même temps les éléments grecs tendaient à supplanter les éléments latins et une centralisation inévitable fortifiait aux mains de l’empereur un pouvoir sans contre-poids. Ces caractéristiques ne se dessinèrent point d’emblée. La succession de Constantin avait donné lieu à des troubles sans intérêt et la brève tentative de réaction païenne de Julien avait passé sans presque laisser de traces. Puis Théodose Ier auquel on décerna le titre de grand pour son orthodoxie, semble-t-il, plutôt que pour les mérites de son gouvernement, avait régné sur l’empire une dernière fois unifié. À sa mort (395) le partage s’était opéré définitivement entre l’orient et l’occident. Pour la Rome impériale c’était l’agonie et la mort prochaines. Pour Byzance rajeunie c’étaient dix siècles qui s’ouvraient d’une existence indépendante, tumultueuse mais grandiose.

En 408 Théodose II qui accédait au trône et devait l’occuper pendant quarante-deux ans était mineur. Sa sœur Pulchérie que l’Église a canonisée pour sa dévotion et son zèle à doter les couvents dirigea l’empire en son nom. Elle était instruite et, bien que de vues étroites, avait le sens du gouvernement. Mais elle aimait si fort le pouvoir qu’elle ne consentit jamais à s’en dessaisir. Et à la mort de son frère (450) qu’elle avait dominé toute sa vie, elle continua de régner jusqu’à sa propre mort[1]. Théodose aimait l’art et l’étude mais il était de caractère faible. « Consciencieux et médiocre » a-t-on dit de lui. On lui doit pourtant les Codes de lois qui portent son nom et surtout la fondation en 426 de l’université de Byzance, événement d’une haute portée dû très probablement à l’initiative de l’impératrice Eudocie. Née païenne, fille d’un modeste professeur athénien, elle avait été choisie par Pulchérie à cause de son humble extraction et par Théodose à cause de sa radieuse beauté. C’était une femme de la plus rare culture. Athènes qui trois siècles plus tard ne serait plus qu’« une petite ville de province tranquille et dévote » restait encore en ce temps là « le dernier asile des Lettres païennes ». Eudocie y avait puisé l’amour non seulement

  1. Les impératrices byzantines n’étaient point couronnées de façon accessoire et comme femmes d’empereurs. Leur couronnement s’opérait à part de celui des empereurs par une cérémonie distincte comme pour bien marquer que le caractère sacré dérivant du titre impérial était indépendant des liens conjugaux et comportait une consécration ineffaçable.