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le triomphe de la république.

était toujours certain de trouver un appel à la concorde, un motif d’espérer en l’avenir ou une raison de croire au progrès. Dans cette ville en fête, un misérable, qui ne l’avait jamais vu, marcha à sa rencontre et, l’ayant aperçu, le tua.

Ses amis et ses ennemis ont dit de lui qu’il était honnête ; mais ce mot-là ne devrait pas avoir pour lui le même sens que pour les autres : il était honnête, en effet, d’une honnêteté exquise et rare qui s’étendait à toutes les minutes de son existence et à toutes les manifestations de sa pensée, d’une honnêteté si pure, si droite, si absolue que la France oublia parfois de s’en apercevoir, comme si elle eût trouvé tout naturel d’avoir pour chef le plus vertueux de ses fils.

L’histoire détaillera les services rendus par le président Carnot à son pays, le prestige dont il sut entourer ses fonctions, l’influence discrète, mais efficace, qu’il exerça sur ses ministres, son amour de la paix, son souci d’encourager les initiatives, ses sympathies pour la jeunesse, sa confiance sereine dans les jours difficiles et sa foi invincible aux destinées de la patrie. Elle dira surtout qu’il a mérité de servir son pays par delà la mort, car son sang a empourpré les sommets de la République. Les hommes aux humbles origines qui l’ont faite ont tous été grandis par le poignard de Caserio, et la vieille Gaule a senti, assemblée autour de ce tombeau, que ses destinées nouvelles et ses libres institutions venaient de recevoir le baptême aux yeux des peuples et des rois.