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la nation armée.

au second plan. Il n’y a qu’une chose qu’elles ne peuvent remplacer : le courage personnel, le sang-froid, la bravoure. Et voilà tout aussitôt deux types d’officiers qui se trouvent en présence, peu faits pour collaborer à la même œuvre : l’officier laborieux utilise les loisirs de la paix pour acquérir le plus de connaissances possible, certain qu’il est d’en trouver toujours l’emploi ; l’officier d’action ne tolère de la vie de garnison que ce qui rappelle la vie des camps et dédaigne la partie purement intellectuelle de sa tâche. Même diversité dans l’armée de mer entre celui qui aspire à courir les océans et celui qui vise à conduire des torpilleurs ou cherche la formule pratique d’un bateau sous-marin.

Ni les uns ni les autres ne pouvaient supporter une longue période de paix. L’attente entraîne forcément la lassitude. À moins de provoquer une guerre européenne, on devait donc escompter un relâchement dans le zèle des officiers ; ce relàchement se fût immanquablement produit s’il n’y avait eu, d’une part, les expéditions coloniales, — la Tunisie, le Tonkin, le Dahomey, — pour faire prendre patience aux impulsifs ; de l’autre, un budget militaire assez considérable pour permettre d’expérimenter, de modifier, d’améliorer sans cesse, et ainsi d’entretenir le zèle des travailleurs et des chercheurs. Il faut noter encore l’attitude souvent indécise du gouvernement allemand, toujours agressive d’une partie de l’opinion allemande. La menace s’est atténuée par instants, mais elle n’a jamais cessé complètement. Si elle eût été plus contenue, plus immuable, la France, à la longue, se fût énervée ; si elle l’eût été moins, le relâchement se fût produit. On voit donc quel