peuple à la fois mobile et stable, léger et profond, sceptique et croyant. Surtout ils ne distinguent pas comment s’opère en lui la division entre le bien et le mal ; la ligne de partage reste invisible. Presque partout ils notent la corruption des mœurs en même temps qu’ils constatent la force et l’union de la famille.
Celle-ci n’a pas changé : depuis des siècles, ses fondements sont les mêmes ; on a pu croire, à diverses reprises, qu’ils étaient ébranlés ; des causes locales et passagères en ont donné l’illusion ; mais ni les révolutions politiques, ni les bouleversements économiques, ni même les vices dont la classe dirigeante a subi souvent les ravages, n’ont sensiblement déformé la famille française. Elle repose, encore aujourd’hui, sur le respect de la femme, sur la tendresse confiante des enfants, sur le culte des morts et sur l’amour du pays. Ce sont là des qualités dont aucun peuple ne saurait réclamer le monopole. Elles existent ailleurs, cela est certain ; peut-être même, si on les envisage séparément, trouvera-t-on que d’autres les possèdent à un degré supérieur. Nos détracteurs disent — et il y a du vrai dans leur critique — que la manière dont les Français traitent la femme comporte plus de galanterie que de respect véritable ; les relations entre parents et enfants leur paraissent empreintes d’une tendresse mièvre ; ils trouvent la religion du deuil et du cimetière à la fois vague et formaliste, et l’attachement au foyer, dans son étroitesse un peu mesquine, est, à leurs yeux, restrictif des grandes ambitions et des entreprises osées.
Très différente est, assurément, cette famille type analysée par Le Play et qui repose d’aplomb sur la stricte