les syndicats ouvriers étaient 221 ; ils sont 1,926. En 1884, il y avait 20 unions. Il y en a maintenant 117[1]; 28 ou 29 bourses du travail centralisent l’action de près de 400 syndicats. Enfin, autour des syndicats se sont groupées des créations de tout genre, orphelinats, écoles, offices de renseignements, services de contentieux, bulletins et revues. Mais l’effort vers la coopération est médiocre ; les sociétés de consommation, entre 1892 et 1893, passent de 38 à 43 seulement, et les sociétés de production de 12 à 16[2]. Le Français a des habitudes invétérées d’individualisme ; il ne recourt à l’association que lorsqu’il ne peut faire autrement ; il n’en a pas l’instinct. Quand, auprès de lui, une association prospère, il cherche toujours celui ou ceux qui la mènent. L’idée de la force collective et anonyme produite par une superposition d’efforts individuels lui demeure étrangère ; il a besoin de se raisonner pour y croire. Cela étant, il semble bien difficile que l’association des travailleurs devienne en France assez puissante pour s’imposer aux pouvoirs publics et aux patrons d’une manière décisive et durable.
La loi n’est pas comme l’association ; il n’est pas besoin de l’acclimater. Le Français est habitué à la respecter et à lui obéir. Qu’une majorité radicale établisse l’impôt vraiment progressif, celui qui limite en fait la fortune privée, — non celui qui, opprimant surtout les moyens, laisse en présence les petits et les grands, — les socialistes n’auront ensuite qu’à perfectionner l’outil dans le sens de leurs