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cet égard une première série d’exercices aptes à fixer le genou et la cuisse tout en permettant au tronc des flexions et des torsions progressives. Les mouvements qui s’exécutent à terre peuvent se répéter à cheval. Peu à peu l’homme s’habituera de la sorte à la pression latérale qui remplace pour le cavalier la pression perpendiculaire du piéton sur le sol.

Les lancers de la balle, du lasso, du poids, pratiqués des deux mains successivement, permettent d’intensifier fortement ces torsions et ces flexions ; puis viennent l’escrime de la canne ou du sabre ; enfin la boxe qui comporte le maximum d’effort. Là, il s’agit d’atteindre un adversaire auquel la facilité de circuler à pied autour de l’appareil permet de se dérober ou de se rapprocher à son gré. On comprend quelle activité musculaire devra déployer l’homme qui est sur l’appareil : activité des bras et du tronc pour accomplir la besogne habituelle du boxeur, et activité très différente des jambes pour se maintenir à cheval. S’il n’y avait pas les entraves des pieds aidant à l’équilibre, la chute interviendrait rapidement. Mais les entraves agissent assez pour que les coups de poing puissent être poussés à fond et pas assez pour que les genoux et les cuisses se trouvent dispensés de faire leur office de tenailles.

Le professeur de boxe avec lequel j’étudiais naguère cette méthode d’un nouveau genre n’était pas en mesure d’en apprécier la valeur hippique mais il la trouvait parfaite par rapport à son art et il se proposait de l’appliquer à ses élèves. « Jamais, disait-il, leurs obliques ne travaillent ainsi à terre. » Un jour, il m’en amena deux qui prirent chacun une leçon de trente minutes ; l’un — déjà très bon boxeur, bon gymnaste aussi, mais qui n’avait jamais enfourché un cheval — éprouva trente-six heures de violentes courbatures en suite de sa tentative ; le second — boxeur d’occasion mais qui avait fait son service dans la cavalerie — ne ressentit aucune fatigue. On peut juger par là à quel degré ces exercices répondent au but visé qui est, je le répète, d’obtenir l’assouplissement spécial propre à préparer le cavalier. On peut se rendre compte en même temps de l’exactitude de ce que j’avançais précédemment, à savoir qu’aucun autre sport, aucun autre agrès ne fournissent l’occasion d’exécuter les mouvements essentiels à cette préparation.

La gymnastique équestre ainsi pratiquée n’a qu’un défaut. Pour chaque élève, il faut un instructeur et un appareil. Mais, d’autre part, elle revêt un caractère assez violent pour qu’une durée de vingt à trente minutes suffise à une leçon vigoureusement menée. L’instructeur n’est nécessaire que pour la boxe ; les maniements d’haltères, lancers, etc., peuvent se faire sans