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mémoires olympiques

et la gratitude à témoigner à des pays qui nous avaient fidèlement appuyés. Mes sentiments personnels devaient être réfrénés dans la mesure où mes fonctions me l’imposeraient. Si j’avais pu, j’aurais voulu donner une place à part, non pas seulement à la Bohème et à la Finlande, mais à la Pologne et à l’Irlande. Ayant spontanément, avant l’arrivée de la lettre russe pressentie, transporté la Finlande sur la liste à la suite de la Russie, et placé la Bohème entre l’Autriche et la Belgique, je commençai une longue controverse genre diplomatique, c’est-à-dire en employant des formules nuancées. Je fis état de cette concession, rappelai que le tsar portait le titre de grand-duc de Finlande, et l’empereur d’Autriche celui de roi de Bohème, qu’ainsi ces deux États avaient un statut les différenciant d’autres territoires de moindre autonomie ; surtout je revins sans cesse sur l’existence indéniable d’une « géographie sportive », distincte de la géographie politique ; j’opposai la manière dont nous avions dû reconnaître ce fait en faveur de la Bohème et de la Finlande, au refus que nous avions opposé à la demande des Sokols croates, formulée l’année dernière et ne reposant pas sur des titres incontestables… Tout mon effort tendit à gagner du temps, et pour cela j’embrouillai la correspondance, écrivant tantôt à Pétersbourg ou à Vienne directement, tantôt à Stockholm, tantôt aux comités nationaux. Je ne tardai pas à constater que tout cela ennuyait fort, non seulement M. Iswolsky, mais le ministère russe, et en effet Pétersbourg finit par nous laisser tranquilles. Avec Vienne, plus tenace, il fallut finalement céder, d’accord avec le comité tchèque lui-même, dont les initiales (C.O.T.) continuèrent seules de figurer sur la