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l’homme des nouvelles-hébrides

déportés n’y devait aborder que six ans plus tard.

Higginson eut la foi ; il ne se préoccupa point de ce que feraient les autres ; il agit par lui-même. Le cadre lui plaisait ; il sut deviner les ressources qu’il ignorait ; la fortune répondit à ses efforts. D’une brousse habitée par les sauvages, il fit un centre de féconde activité. Il créa l’industrie métallurgique du cuivre et fonda au Diahot une importante usine. Non loin avait été découvert un gisement aurifère ; il y établit une exploitation perfectionnée. Ailleurs, il mit en œuvre des mines de plomb argentifère. Au Bourail qui devint ainsi un grand centre de travail pour les libérés, il construisit une usine pour le traitement des cannes à sucre. Il organisa un service postal à vapeur entre Nouméa et Sydney et un autre service entre Nouméa, i’île des Pins et les Loyalty. Enfin, il inaugura la grande industrie du nickel. Avant lui, la France était, à cet égard, tributaire de l’Angleterre et de l’Allemagne. Grâce à lui, la situation est désormais renversée.

Voilà, semble-t-il, de quoi remplir une vie humaine et l’illustrer. Higginson n’en jugeait pas ainsi. Il ne se trouvait pas quitte envers la France. Les gouvernants lui avaient octroyé des lettres de « grande naturalisation ». Il voulut en échange leur assurer un archipel.

Cet archipel, à ses yeux, constituait une dépendance naturelle et nécessaire de la Nouvelle-Calédonie. Au point de vue du droit, on devait l’estimer compris dans l’acte d’annexion dressé en 1853, — seule, la longue négligence des pouvoirs publics (qu’excusait dans une certaine mesure l’inutilité apparente d’une semblable initiative) en ayant retardé la prise de possession effective. Il est vrai que, dans l’intervalle, des colons anglais s’y étaient installés. Mais ces mêmes colons n’avaient-ils pas, à deux reprises, sollicité du gouverneur de la Nouvelle-Calédonie l’établissement du protectorat français ? Que, dans leur besoin de voir s’organiser un régime régulier, ils se fussent adressés à la France plutôt qu’à l’Angleterre, n’y avait-il pas là une preuve irréfutable de l’excellence de nos titres ? Si, à ce moment, la