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dans les Stances pour la guérison de Chrysanthe :

Soient toujours de nectar nos rivières comblées[1].


Plus d’un trait rencontré dans Virgile se retrouvait, naturellement, chez Ovide, et notamment les Métamorphoses racontaient longuement l’histoire de ces « feuilles peintes » dont Malherbe se souvient volontiers[2]. Elles racontaient à peu près tout ce que les poètes français pouvaient utiliser de mythologie : et c’est souvent avec les traits qu’elles leur donnent que notre poète présente les héros antiques. Parmi toutes ses « épargnes d’esprit », comme disait Bayle[3], ou, comme il disait lui-même, parmi tous les « objets qu’on pouvait mettre sur sa cheminée après les avoir mis sur son cabinet[4] », l’une des fictions qu’il place et replace le plus volontiers est celle des Argonautes. Elle lui est devenue si familière, que comme chez Ovide, elle est employée métaphoriquement :

Employant ce Tiphys, Syrtes et Cyanées
Seront havres pour toi[5].


C’est à Louis XIII qu’il parlait ainsi, et ce Tiphys, c’était Richelieu. Mais il y avait longtemps qu’il répétait la même histoire, et beaucoup plus longuement, à tous

  1. Malh., I, 298.
  2. Métam., XIII, 391-396.

    Ronsard adaptait cette histoire en disant de la mort de Henri :

    Et l’œillet sur sa feuille inscrivit ce malheur.

    (Ronsard, IV, 21).
  3. Dictionnaire, art. Malherbe.
  4. Ménage, o. c., p. 518.
  5. Malh., I, 279. Cf. Ov., Tristes, I, IX, 33 :

    Haec præcor evincat, propulsaque flantibus Austris
    Transeat instabiles strenua Cyaneas.