Page:Cournot - Considérations sur la marche des idées et des événements dans les temps modernes, tome 1, 1872.djvu/16

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fait sentir, quand même on aurait pu prévenir ou réprimer en France la Révolution, et ce qui tient aux causes locales ou spéciales qui ont déterminé en France une crise révolutionnaire. Au point de vue de l’histoire pragmatique, comme disent les Allemands, ou, en d’autres termes, au point de vue de l’historien de profession, cette distinction peut sembler trop subtile, ou trop incertaine, ou trop dénuée d’utilité pratique. Elle nous paraît capitale au point de vue de la philosophie de l’histoire, et nous regretterions qu’on s’empressât de la condamner sur un essai trop imparfait.

Maintenant, nous demanderons la permission d’entrer dans quelques explications plus personnelles à l’auteur : car, s’il convient toujours que l’auteur se cache dans son livre, il ne lui est pas interdit de se montrer un instant dans la préface. Nous rappellerons donc que l’auteur du présent livre n’est pas, tant s’en faut, un débutant ; qu’il a au contraire depuis longtemps soumis au public ses idées sur divers sujets de grande importance : idées qui procèdent toutes d’une certaine manière de philosopher à laquelle il doit naturellement tenir, comme tous les hommes tiennent à ce qui les a attirés, fixés, amusés, consolés pendant tout le cours d’une longue vie. Il faut donc s’attendre à retrouver ici les mêmes idées reprises à un nouveau point de vue, justifiées par de nouveaux aperçus, quelquefois exprimées dans les mêmes termes, quand on n’a pas cru pouvoir en rencontrer de plus clairs et de plus précis. Et par la même raison, il ne faut pas que l’auteur s’attende à plus de vogue que n’en ont eu ses premiers essais. Déjà, dans la Revue des Deux-Mondes et dans le Journal des Débats, deux philosophes de grand renom, MM. Vacherot et Taine, ont bien voulu dire « qu’on ne nous avait pas assez lu. » C’est ce que tout auteur pense de ses œuvres et ce qu’on ne lui dit pas tou-