— Cinq ou six jours au plus, selon l’humeur de la mer.
— Et vous partez sans regrets ?
— Oh, j’ai déjà passé deux ans dans les steppes de la Russie ; je suis un vagabond. J’ai le cœur libre. Je ne rêve jamais.
J’ajoutai à l’étourdie :
— Et puis, j’emmène un malade avec moi pour me… distraire !
— Ah, fit-elle intéressée.
J’en avais trop dit et je me troublai légèrement ; mais elle, feignant de ne pas voir mon embarras :
— Un malade ! Oh contez-moi ! Un pauvre poitrinaire sans doute. Oui, ce climat des îles opère des résurrections…
Je la dévisageai. Elle était toute sincérité, toute candeur.
— En effet, répondis-je, c’est un phtisique, mais un phtisique spécial, un phtisique de l’âme…
— Oh alors, fit-elle en riant, le cas n’est pas du tout incurable !