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Page:Courteline - Bourbouroche. L'article 330. Lidoire. Les balances. Gros chagrins. Les Boulingrin. La conversion d'Alceste - 1893.djvu/75

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Gabrielle.

Parfaitement. Et je fouille dans son secrétaire.

Caroline.

Tu as la clé ?

Gabrielle.

J’en ai fait faire une.

Caroline.

Ce que tu as bien fait !

Gabrielle.

N’est-ce pas ?

Caroline.

Tiens !…

Gabrielle.

Oh ! ce n’est pas par curiosité !

Caroline.

Bien sûr, non !

Gabrielle.

C’est par prévoyance !

Caroline.

Sans doute !

Gabrielle.

Mieux vaut avoir deux clés qu’une seule. Au moins si on perd la première…

Caroline.

On a la seconde.

Gabrielle.

Voilà tout. — Et à propos ; que je te fasse rire ! Est-ce que je t’ai conté que l’autre jour, j’avais perdu la clé de chez nous ?

Caroline, très intéressée.

Ta clé ! Non ! Quand ?

Gabrielle.

La semaine dernière ! Comment, je ne t’ai pas dit cela ?

Caroline.

En voilà la première nouvelle !

Gabrielle, se tordant de rire.

Ah ! ma chère !… Ça a été toute une histoire ! J’avais passé la soirée chez maman, figure-toi. Tu sais que maman, le jeudi soir, donne du thé et des petits fours ? Bon ! Minuit sonnant, je saute en fiacre ; j’arrive chez nous, je grimpe mes trois étages quatre à quatre. Une fois à ma porte, pas de clé !

Caroline.

Pas de clé ?

Gabrielle.

Pas l’ombre !

Caroline.

Ça, c’est drôle ! Et ton mari ?

Gabrielle.

Au cercle !

Caroline.

Un vrai guignon !

Gabrielle.

Crois-tu ! Avec ça, pas de lumière ! Je n’ai jamais tant ri. Je suis restée sur le palier jusqu’à deux heures du matin à attendre le retour de Fernand ! (Fondant brusquement en larmes.) Fernand !… Ah ! le gredin ! Ah ! le monstre !… Il me trompe !… — Où donc en étais-je ?

Caroline.

Aux poches retournées.

Gabrielle.

C’est juste. — Eh bien, j’y ai trouvé une lettre, dans sa poche.

Caroline.

Une lettre oubliée ?

Gabrielle.

Parfaitement !


GABRIELLE. — Ah ! le gredin !
Caroline.

Mon Dieu, que les hommes sont bêtes ! Ce n’est pas à nous que ces oublis-là arriveraient !

Gabrielle.

Oh ! non !

Caroline.

De qui, la lettre ?

Gabrielle.

Devine !

Caroline.

Ma foi…

Gabrielle.

Ne cherche pas, va ! C’est tellement monstrueux, tellement abject, tellement ignoble ! — Rose Mousseron ?

Caroline.

De Parisiana ?

Gabrielle.

Oui, ma chère ; de Parisiana ! Cette fille qui chante :

J’ai z’une petite maison
J’ai z’unÀ Barbe
J’ai z’unÀ Barbe
J’ai z’une petite maison
J’ai z’À Barbizon !