Page:Couturat - Le principes des mathématiques, La Philosophie des mathématiques de Kant (1905) reprint 1980.djvu/261

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considérées comme faisant partie de la Mathématique pure, et quel est leur rapport aux deux formes a priori de la sensibilité qui en sont selon lui le fondement. La pensée de Kant est singulièrement flottante sur ces deux points, pourtant essentiels. Dans la Dissertatio [De la forme et des principes du monde sensible et du monde intelligible] de 1770, l’espace était l’objet de la Géométrie, le temps celui de la Mécanique pure ; et ces deux sciences faisaient partie de la Mathématique pure. Quant au nombre, c’était un « concept intellectuel », qui se réalisait in concreto au moyen de l’espace et du temps. Dans l’Esthétique transcendentale, l’espace est le fondement des vérités géométriques, mais on ne dit pas de quelle science le temps est le fondement ; les principes apodictiques fondés sur cette forme a priori sont les suivants : « le temps n’a qu’une dimension ; des temps différents ne sont pas simultanés, mais successifs » (§ 4, 3). Tels sont les « axiomes du temps » selon la 1re édition de la Critique ; ils n’ont, comme on voit, rien de commun avec les axiomes de l’Arithmétique. Dans l’« explication transcendentale » ajoutée à la 2e édition (§ 5), Kant est un peu plus explicite : le temps fonde la possibilité de tout changement, en particulier du mouvement (changement de lieu), et par suite de « la science générale du mouvement, qui n’est pas peu féconde », et qui est déclarée être une connaissance synthétique a priori. Cette conception est d’ailleurs conforme à la thèse soutenue par Kant au sujet du principe de contradiction, à savoir que ce principe devient synthétique dès qu’on y introduit la notion de temps en l’énonçant comme suit : « Il est impossible qu’une chose soit et ne soit pas en même temps » (A. 152, B. 191). Mais elle s’accorde mal avec ce que Kant [253]